La proximité géographique de la guerre a transformé la carte des intérêts stratégiques en Europe. Le système des alliances, des partenariats et des coalitions se reconfigure : l’alliance transatlantique n’est plus en concurrence avec la défense européenne, et la relation entre l’OTAN et l’UE se renforce, notamment dans les domaines naval et aérien. Alors que la guerre se poursuit en Ukraine, l’Europe multiplie les déclarations et les mesures en faveur de la mise en place d’une économie de guerre et le développement d’une culture stratégique commune. Le retour de la guerre appelle notamment à renouveler la façon d’accompagner l’innovation de rupture dans les domaines technologiques intéressant la défense, sans perdre de vue d’autres problématiques, à commencer par celle du défi climatique.

La géopolitique de l’Europe se remodèle depuis le début de la guerre en Ukraine. Ce changement amène une réflexion sur la géostratégie, notamment à l’Est, mais aussi dans la région baltique, ou dans l’Europe du Sud qui évolue au contact des autres pays riverains de la Méditerranée. Si l’Europe fut toujours un carrefour entre plusieurs grandes régions du monde, les nombreuses évolutions rencontrées par ces dernières contraignent l’Europe à s’adapter : en Afrique, où la présence européenne pâtit de la situation sécuritaire ; en Asie où la compétition stratégique semble accaparer les ressources et l’attention politique ; dans les océans Indien et Pacifique, où l’Europe est présente via ses territoires ultramarins. Dans ce contexte, l’Europe doit saisir ce qu’impliquent les défis géostratégiques posés par un certain nombre d’acteurs (Chine, pays de l’Indopacifique, Iran, etc.).

Avec le retour de la guerre en Ukraine, les armées européennes ne peuvent qu’assister à un cycle de ruptures stratégiques : le conflit russo-ukrainien est parvenu à remettre en question un certain nombre de conceptions sur les milieux terrestre, naval et aérien, et a démontré l’importance des nouveaux milieux de conflictualité (espace extra-atmosphérique, cyber) et de champs (désinformation, etc.). Dans le même temps, l’Europe est confrontée à une intensification des tentatives d’ingérence de la part de différents compétiteurs, rappelant à cet égard l’importance de l’influence. Enfin, si les conflits actuels sont marqués par la prédominance des armements conventionnels, la multiplication des déclarations et des menaces quant à l’emploi du feu atomique permet d’envisager la dissuasion nucléaire sous un nouvel angle.