Sur fond de guerre en Ukraine, le président de la République, Emmanuel Macron a profité de l’inauguration du salon Eurosatory pour déclarer vouloir « ajuster les moyens aux menaces. J’ai demandé au ministre des Armées et au chef d’état-major des Armées de pouvoir mener dans les semaines qui viennent une réévaluation de la loi de programmation militaire à l’aune du contexte géopolitique ». Pour le président de la République, le durcissement du contexte stratégique implique des décisions à la hauteur des enjeux : « La France est entrée dans une économie de guerre dans laquelle, je crois, nous allons devoir durablement nous organiser. »

Ajuster les moyens aux menaces

En attendant de réévaluer la hiérarchie des investissements actuels pour faire face au retour de la guerre en Europe, la délégation officielle a déjà pu constater la matérialisation d’une politique d’acquisition et de rénovation des équipements, encadrée par la loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025.

Au cours d’une longue déambulation à travers les allées d’un stand de 2 500 m2, le président de la République et le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, ont observé le spectre capacitaire renouvelé de l’armée de Terre, qui lui permet d’entrer dans l’ère du combat collaboratif infovalorisé. Le large éventail de matériels modernes et innovants, exposé par le ministère des Armées, était organisé en cinq pôles thématiques : programme Scorpion, aéro-combat, appui-feu, combattant, expertise DGA.    

La visite a débuté par le pôle aéro-combat où la délégation a pu scruter dans les moindres détails l’hélicoptère interarmées léger H160M Guépard. L’appareil est le fruit d’un ambitieux programme de renouvellement de la flotte d’hélicoptères des trois armées françaises, destiné à toutes les doter d’une même plateforme. Fin 2021, la France a officialisé la commande de 169 appareils. L’Aviation légère de l’armée de Terre (ALAT) recevra 80 exemplaires du Guépard, qu’elle utilisera pour des missions de reconnaissance armées, d’infiltration de forces spéciales, d’appui-feu et d’appui au commandement.

Installé à la place du pilote, le chef de l’Etat a découvert un cockpit futuriste, doté d’une interfaces directe et intuitive. « Nous lui avons présenté les nouvelles technologies qui font la force de cet appareil nouvelle génération. Désormais, tout est tactile. C’est nouveau dans le monde des hélicoptères », explique le lieutenant-colonel Xavier, chef d’équipe de la marque Guépard. A l’heure du combat collaboratif, cet équipement est relié à la bulle Scorpion pour offrir une vision synthétique de l’environnement extérieur et faciliter la prise de décision collective. « Le plus important est de savoir où sont les amis, qu’ils soient en hélicoptère ou au sol. Dans un deuxième temps, nous devons être capables de faire remonter rapidement la position des ennemis pour pouvoir ensuite donner des ordres (attaques, renseignements...). »

Après le pôle aéro-combat, le président de la République et le ministre des Armées se sont familiarisés avec les nouvelles tenues des combattants et notamment le Système de mise à terre des chuteurs opérationnels (SMTCOPS). « Il a pour but de remplacer les parachutes G9, dont la charge est limitée à 160kg. Désormais les forces spéciales pourront emporter 200kg à 9000m d’altitude. Avec une infiltration à 50km de l’objectif, cela améliorera la discrétion », indique le lieutenant-colonel Joseph, officier de programme du domaine SMTCOPS. Le président de la République n’a d’ailleurs pas hésité à tester les lunettes Athos, un afficheur « tête haute » pour les forces spéciales.

Une LPM 2019-2025 à « hauteur d’homme »

Là aussi, tous ces nouveaux équipements présentés sur le pôle « combattant » sont le résultat d’une LPM 2019-2025 qui se veut à « hauteur d’homme ». Une expression qui traduit la volonté bien réelle d’investir dans les technologies de pointe pour renforcer l’efficacité opérationnelle et améliorer le quotidien des soldats.

Plus loin, sur la partie appui-feu, Emmanuel Macron et Sébastien Lecornu se sont fait présenter le système sol-air moyenne portée/terrestre SAMP/T. « Il forme une bulle de protection autour des sites sensibles. Il est actuellement déployé en Roumanie. Le SAMP/T est capable d’intercepter des aéronefs à 100 km de distance. C’est un élément important du combat collaboratif puisqu’il est capable de communiquer avec le poste de commandement et des Rafales par exemple », précise le sergent Tess, opératrice défense sol/air.

La visite s’est ensuite achevée dans les différentes parties du stand dédiées au programme Scorpion (synergie du contact renforcé par la polyvalence et l’info-valorisation). Ce programme conduit par la Direction générale de l'armement (DGA) consiste en une transformation numérique majeure, pour faire circuler l’information en temps réel entre tous les systèmes d’armes, d’un groupement tactique interarmes (GTIA).

Le couple Griffon-SICS au centre de toutes les attentions

Le programme Scorpion a nécessité le développement d’une nouvelle génération de véhicules blindés exposés sur le stand, le Griffon dont sa version Mortier embarqué pour l'appui au contact (Mepac), le Jaguar et le Serval. Il est également à l’origine de la rénovation du char Leclerc. Ces nouvelles plateformes ont été élaborées pour pouvoir être intégrées dans une architecture numérique commune. La connectivité renforcée entre les véhicules est assurée par le Système d’information du combat scorpion (SICS). Une application qui permet à toutes les unités déployées de partager en permanence une situation tactique actualisée.

Au cours de cette visite inaugurale, le couple Griffon-SICS a été au centre de toutes les attentions. Sept mois après son premier déploiement majeur dans la bande sahélo-saharienne, la section technique de l’armée de Terre a pu exposer au chef de l’Etat, la plus-value opérationnelle de la combinaison entre un véhicule nouvelle génération et un système d’information de pointe.

Enfin, dans un espace immersif intitulé « Scorpion la suite », le président Macron et le ministre des Armées se sont intéressés à l’évolution à long terme des ambitions de combat collaboratif infovalorisé. A l’horizon de 2040 et en vue de faire face à des conflits de haute intensité, le projet TITAN prendra le relais du programme Scorpion pour étendre cette capacité au niveau interarmées et interalliés.

La 27e édition d’Eurosatory est l’occasion pour le ministère des Armées de présenter des améliorations capacitaires rendues possibles par la LPM 2019-2025. La loi de programmation militaire, adoptée en 2018, prévoit un rehaussement progressif de l’effort national de défense pour atteindre jusqu’à 2% du PIB en 2025. Cette trajectoire budgétaire a été voulue pour permettre à la France de faire face à une dégradation rapide et durable du contexte stratégique.

Le conflit en Ukraine qui fait peser de nouvelles menaces sur le continent européen, oblige à poursuivre cet effort en faveur d’un renforcement des capacités des armées.

En ce sens, la journée d’ouverture d’Eurosatory a été l’occasion d’exprimer une volonté présidentielle forte : « aller plus vite et plus fort ! ».