Le droit de vote des femmes, 21 avril 1944. Éclairage par Claire Andrieu

C’est une ordonnance prise à Alger par le Comité Français de la Libération Nationale, après un vote de l’Assemblée Consultative Provisoire, qui a permis aux Françaises de devenir électrices et éligibles. Pour aboutir à ce résultat, il a fallu surmonter des réticences à la fois sexistes et politiques.

Extrait de l’article 17 de l’ordonnance du 21 avril 1944, Journal Officiel du 22 avril 1944.

Jusqu’au bout, le vote des femmes en France s’est heurté à des résistances sexistes et politiques. Il n’a été acquis qu’en avril 1944, grâce à l’action du Comité français de la Libération nationale (CFLN) et par un vote de l’Assemblée consultative provisoire (ACP) siégeant à Alger. Au préalable, en juin 1942, le général de Gaulle s’était prononcé en faveur du vote des femmes dans sa Déclaration aux mouvements de résistance. Mais quand le programme du Conseil national de la Résistance a été signé dans la clandestinité le 15 mars 1944, le vote des femmes n’y figurait pas du fait de l’opposition du parti radical. C’est à l’ACP d’Alger que revient la décision finale, entre le 22 et le 24 mars.

L’action de l’ACP se déroule en deux temps. Avant le vote en séance publique, la Commission de législation présidée par René Cassin adopte le principe du suffrage féminin mais elle choisit d’en reporter l’application à l’adoption du même principe par la future Assemblée nationale constituante. C’était mettre un nouveau délai et peut-être un nouvel obstacle à l’égalité des droits des femmes et des hommes.

A l’ACP, les séances publiques du 22 et du 24 mars 1944 renversent la situation. Sur l’intervention du délégué Robert Prigent, un démocrate-chrétien, syndicaliste CFTC et militant de la JOC (Jeunesse ouvrière chrétienne), le principe du suffrage féminin est d’abord inscrit dans le projet d’ordonnance. Le surlendemain, Fernand Grenier, un député communiste, obtient pour que soit décidée l’égalité entière et immédiate des droits de vote des femmes et des hommes.

Par l’ordonnance du 21 avril 1944, la France comblait le retard qui la séparait d’autres pays industrialisés comme les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou l’Allemagne. Le « rattrapage » aurait eu lieu, de toute façon, mais les circonstances ont joué un rôle. Comme l’ont souligné plusieurs délégués d’Alger, les femmes résistaient autant que les hommes en métropole. Comment leur refuser la citoyenneté quand elles se comportaient d’elles-mêmes en patriotes ?


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