HMS Glamorgan - Le survivant des Malouines
Le 2 avril 1982, le destroyer britannique HMS Glamorgan participe à l’exercice Springtrain au large de Gibraltar lorsqu’il reçoit l’ordre de mettre cap au sud : l’Argentine vient d’envahir les îles Malouines.
Après une escale au large de l’île britannique de l’Ascension, où la Task Force se rassemble pour se ravitailler en munitions et en pièces de rechange, le HMS Glamorgan met le cap sur les Malouines, tandis que son équipage se prépare au combat : des charges de sabordage sont placées dans les fonds, des combinaisons de survie et des ampoules de morphine sont distribuées à l’équipage, et tout le matériel inutile est jeté par-dessus bord, y compris le piano du carré officiers. Surtout, le navire est soumis à un entraînement intensif dans tous les domaines de lutte.
50e HURLANTS
Ayant rejoint les 50e hurlants, le Glamorgan passe à l’action pour la première fois dans la soirée du 1er mai 1982 en bombardant au canon de 114 mm les positions argentines situées autour de la ville de Port Stanley, accompagné des frégates HMS Arrow et HMS Alacrity. Les navires britanniques sont attaqués par trois chasseurs argentins Dagger, qui lâchent deux bombes de 230 kg de part et d’autre du Glamorgan tout en tirant à la roquette et au canon, provoquant des dommages mineurs.
Deux semaines plus tard, le 14 mai, il appuie les forces spéciales britanniques lors d’un raid destiné à détruire un radar et une piste d’aviation à l’ouest des Malouines. Pendant les deux semaines suivantes, il est presque continuellement engagé dans des bombardements de positions côtières, principalement pour détourner l’attention du débarquement amphibie qui se déroule dans la baie de San Carlos le 21 mai, mais aussi contre l’aérodrome de Port Stanley et en soutien direct aux forces britanniques à terre.
En quête d’innovation pour accomplir sa mission du mieux possible, l’équipage propose même d’employer le missile antiaérien à longue portée Seaslug comme missile de croisière : le 29 mai, il tire notamment avec succès l’un de ces missiles contre un site radar de l’armée de l’air argentine.
ALERTE MISSILE !
Au début du mois de juin, le Glamorgan est détaché pour assurer la protection de la zone de réparation et de logistique, située à 200 nautiques des îles Falkland. Après un mois d’opérations de guerre, menées de jour comme de nuit, ce répit permet la régénération de l’équipage et des équipements durement éprouvés par les combats et les conditions météorologiques.
Mais la campagne terrestre atteint son point culminant et le Glamorgan est rappelé dans la soirée du 11 juin pour soutenir les Royal Marines dans la bataille de Two Sisters, l’un des verrous d’accès à la ville de Port Stanley. La Royal Navy sait que la marine argentine a débarqué des missiles antinavires MM38 Exocet de ses frégates et les a transportés aux Falkland, où ils ont été assemblés sur un lanceur improvisé, mais elle suppose que la menace se trouve à Port Stanley quand elle vient d’être déplacée de plusieurs kilomètres à l’ouest.
Le 12 juin 1982, à 6 h 37, après une nuit de bombardement, le HMS Glamorgan s’éloigne des côtes des Malouines à 20 nœuds et vient tout juste de rompre du poste de combat quand la passerelle détecte une lueur provenant de la terre. Comme l’intercepteur radar ne détecte aucun autodirecteur actif, le central opérations l’interprète comme un hélicoptère avant de comprendre son erreur et de tirer un missile Seacat, trop tardivement pour qu’il soit efficace. L’officier de navigation, ayant compris qu’il s’agit d’un missile, lance une giration évasive à grande vitesse qui ne peut éviter l’impact. Avant que la prise des dispositions antimissiles n’ait pu être ordonnée, le missile frappe le hangar hélicoptère du Glamorgan, y provoquant une brèche de 3 m par 5 m avant d’y exploser. L’hélicoptère Wessex qui y est stationné, ravitaillé en carburant et en munitions, explose à son tour et un incendie majeur se déclare dans le hangar. La cuisine située sous ce dernier est dévastée. Si le HMS Glamorgan conserve sa propulsion et sa manœuvrabilité, trois diesels alternateurs sur cinq sont perdus et il s’incline sous l’effet cumulé de l’eau utilisée pour arroser le feu et des collecteurs d’eau de mer rompus qui se déversent dans le bâtiment.
POSTE DE SÉCURITÉ
Débute alors un combat pour sauver le navire, dont la chronologie est encore citée en exemple dans les écoles de la Royal Navy :
- 6 h 52 : toutes les parois du hangar sont refroidies ;
- 7 h 20 : le feu du hangar est maîtrisé. La circulation d’eau est circonscrite par l’érection de cloisons de fortune (faites notamment de sacs de pommes de terre...) et le pompage de l’eau est lancé ;
- 7 h 58 : le bâtiment se stabilise à 12° de gîte, les ballasts sont remplis pour améliorer la stabilité ;
- 8 h 11 : la gîte est réduite à 4° à bâbord ;
- 10 h 54 : tous les feux sont éteints, les voies d’eau sont maîtrisées et l’eau injectée dans le navire est pompée à l’extérieur. Le HMS Glamorgan est sauvé.
Les treize membres d’équipage qui ont perdu la vie dans l’attaque sont inhumés en mer le soir même. Un quatorzième marin succombera à ses blessures quelques mois plus tard. Dans la nuit, le Glamorgan est rejoint par le navire de soutien réquisitionné Stena Seaspread, qui apporte une assistance technique mais aussi morale, en fournissant notamment des repas chauds à l’équipage. La disponibilité de la plupart des armes du bord est rapidement recouvrée et, dès le lendemain de l’attaque, le navire participe à une récupération de commandos parachutés en mer. Après la capitulation argentine signée le 14 juin, le destroyer blessé rejoint la baie de San Carlos pour y poursuivre ses réparations à l’abri. Une semaine plus tard, le HMS Glamorgan quitte l’Atlantique sud et arrive à Portsmouth le 10 juillet 1982 après 104 jours en mer, 1 243 obus et 7 missiles tirés.
L’entraînement, mais aussi la pugnacité, la débrouillardise et la cohésion de l’équipage, ont permis au Glamorgan de survivre à l’impact d’un missile et d’être prêt à reprendre le combat quelques heures plus tard.
L’officier navigateur du Glamorgan, le capitaine de corvette Ian Inskip, a publié en 2002 son journal de marche intitulé Ordeal by Exocet, HMS Glamorgan and the Falklands War 1982. Une synthèse en français de cet ouvrage a été publiée en juillet 2020 par le capitaine de frégate Thibault Lavernhe dans la Revue Défense nationale.
CF FRANÇOIS OLIVIER CORMAN
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