Décryptage : Bioluminescence marine, et la lumière fut
Depuis mars 2025, le golfe du Lion est le théâtre de recherches scientifiques sur
la bioluminescence marine. L’Institut méditerranéen océanographique et le Service hydrographique et océanographique de la Marine se sont associés pour le projet BIOLUMOPS afin d’approfondir les connaissances scientifiques sur la bioluminescence et évaluer les risques de celle-ci sur les opérations sous-marines.
René Descartes et avant lui Aristote, Pline l’Ancien ou encore Tite Live avaient remarqué cette lumière émise par la mer. La bioluminescence marine fascine, émerveille, interroge, elle nous mène aux frontières d’un monde largement inexploré : les fonds marins.
76 % d’organismes bioluminescents dans l’océan
Les scientifiques ont découpé l’océan en profondeur de la surface aux abysses. Au-delà de 1 000 mètres, dans la zone bathypélagique commence le règne de l’obscurité. Si la portée des rayons du soleil s’arrête ici, la lumière ne disparaît pas totalement puisque le vivant prend le relai, et ce sont microplanctons, crustacés, méduses, poissons, requins…qui soudain s’éclairent.
La production et l’émission de lumière par des organismes vivants s’appelle la bioluminescence. 76 % des animaux vivants dans l’océan sont bioluminescents. La diffusion de la lumière varie d’une espèce à une autre mais elle s’exprime en majorité par des flashs lumineux activés par une stimulation mécanique
Furtivité et bioluminescence
La furtivité est l’une des priorités de la Marine lorsqu’elle mène des opérations sous-marines. Or, comme le souligne la chercheuse au CNRS Séverine Martini : « Le passage de nageurs de combat ou de sous-marins dans l’océan peut laisser une trace lumineuse en stimulant les organismes bioluminescents. » Les enjeux sont clairs, la Marine doit s’emparer de ce sujet afin d’éviter que certaines de ces opérations ne soient percées à jour par ces petites lampes vivantes. Quels organismes vont produire de la bioluminescence ? À partir de quel seuil la bioluminescence est telle que les nageurs de combats peuvent être découverts ? Des capteurs miniaturisés pourraient-ils être utilisés par la Marine ? « Pour nous, il y a des enjeux scientifiques autour d’une meilleure connaissance de la répartition de ces organismes, leurs dynamiques spatio-temporelles. On a identifié des sujets d'étude communs pour à la fois éclairer la science et mieux utiliser les capteurs de bioluminescence pour la Marine », déclare Séverine Martini.
Science et défense
Face à ces enjeux, l’intelligence collective est mobilisée et le projet BIOLUMOPS voit le jour en 2024. L’objectif est double : contribuer à l’étude de la composition biologique de la structure des écosystèmes marins à travers les signaux de la bioluminescence.
Et, soutenir la Marine dans l’évaluation des risques de bioluminescence pendant les opérations nocturnes impliquant des bateaux, des nageurs de combat ou des sous-marins. Porté par l’Institut Méditerranéen d’Océanographie (MIO) et le Service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM), le projet s’étale sur trois ans. La première année aura servi à la mise en place des instruments nécessaires aux trois missions prévues en mars 2025, en août 2025 et en 2026 dans le golfe du Lion de la surface à 600 mètres de profondeur. Les derniers mois permettront l’analyse des données récoltées, l’émergence de nouvelles idées, de nouvelles solutions et de projets futurs.
Trois questions à... Séverine Martini Chargée de recherche au CNRS à l’Institut méditerranéen d’Océanographie
Comment la bioluminescence est-elle créée ?
Séverine Martini : La bioluminescence résulte d’une réaction chimique entre une luciférine qui, en présence d’oxygène et d’une enzyme nommée luciférase, entraîne la création d’une molécule, (l’oxyluciférine) et l’émission de lumière. C’est la réaction basique mais il peut y avoir des molécules un peu différentes en fonction des organismes. La bioluminescence est une réaction chimique et non pas une réaction physique, contrairement à la fluorescence ou la phosphorescence qui nécessitent l’intervention d’une lumière extérieure.
Quelles couleurs sont émises ?
S. M. : La bioluminescence est principalement centrée autour du turquoise au vert, soit une plage de longueurs d’onde autour de 490 à 520 nanomètres. Il y a évidemment des exceptions, par exemple, des poissons sont capables d’émettre de la bioluminescence dans le rouge, comme le poisson-dragon, des vers marins dans le jaune et des méduses dans le violet…
Quelles sont les fonctions de la bioluminescence ?
S. M. : Une étude a classifié les modes d’utilisation de la bioluminescence en trois grands groupes. Elle servirait à certains prédateurs de leurre pour attirer leurs proies pour se nourrir. Certaines espèces l’utilisent pour repousser un prédateur en l’éblouissant pour se cacher ou s’enfuir. Enfin, la bioluminescence permettrait de communiquer et, par exemple, reconnaître un partenaire sexuel avec des schémas lumineux.
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