Baptiste Domps remporte le prix Daveluy pour sa thèse sur la détection précoce de phénomènes environnementaux extrêmes par radar.

Direction : AID / Publié le : 14 décembre 2022

Organisé par le Centre d’Enseignement Supérieur de la Marine (CESM), le prix de Stratégie Maritime Amiral Daveluy récompense, depuis 1994, les meilleurs travaux universitaires s’intéressant aux problématiques maritimes ou navales pour faire rayonner la Marine nationale dans le milieu universitaire et scientifique.

Prix thèse Baptiste Domps

Baptiste Domps est lauréat de ce prix 2022 pour sa thèse sur la détection précoce de phénomènes environnementaux extrêmes par radar. Elle a été réalisée au sein de l’Institut Méditerranéen d'Océanologie (MIO) de l’université de Toulon. La remise des prix a eu lieu lundi 12 décembre à l’école militaire en présence du chef d’état-major de la Marine nationale.

L’objectif de la thèse, intitulée « Identification et détection de phénomènes transitoires contenus dans des mesures radar à faible rapport signal à bruit. Applications conjointes aux problématiques océanographiques et atmosphériques », était de mettre au point une méthode d’analyse de signaux radars adaptée à l’observation de phénomènes géophysiques rapides (courants rapidement variables ou tsunamis à la surface de la mer ; turbulences, tourbillons et cisaillements dans l’atmosphère). La technique de traitement du signal développée permettrait de détecter l’onde génératrice d’un tsunami et donc de prédire son arrivée quelques minutes ou quelques heures avant son arrivée sur une côte.

L’observation de la dynamique de l’atmosphère et de la surface de l’océan peut être réalisée par télédétection radar. L’approche habituelle consiste, dans les deux cas, à calculer numériquement le spectre Doppler des échos temporels reçus à l’aide d’une transformée de Fourier discrète. Une transformée de Fourier est une technique qui permet de représenter des signaux dans le domaine des fréquences et ainsi de remonter à leur vitesse (effet Doppler). Bien que satisfaisante pour la plupart des applications, cette méthode ne convient pas pour l’observation de phénomènes transitoires, plus courts que le temps d’intégration nécessaire à l’observation radar.

Radars océanographique côtier. Crédits : B. DOMPS. © Radars océanographique côtier. Crédits : B. DOMPS.

Les radars océanographiques côtiers utilisent généralement des temps d’intégration longs, de l’ordre de la vingtaine de minutes. Or des variations rapides du courant (phénomènes instationnaires) nécessitent des temps d’intégration courts, de l’ordre de la minute, pour lesquels le traitement standard à base de transformée de Fourier ne permet pas une estimation précise. Une technique alternative a été utilisée dans le travail de recherche pour améliorer la précision. Celle-ci était basée sur une représentation autorégressive des séries temporelles radar et associée à la méthode dite à entropie maximale. Cette approche est appliquée à la mesure de courants de surface par radar côtier dans la bande des hautes fréquences, puis à celle de vent dans la basse atmosphère par radar en

bande L.

 

Quels sont les résultats obtenus ?

Les simulations numériques réalisées ont  démontré que l’approche proposée conduit à des estimations fiables des grandeurs géophysiques (courants marins et vitesses de vent) pour des temps d’intégration brefs, là où la méthode conventionnelle échoue. La méthode a également été validée sur des observations radar réelles. En particulier, un tsunami météorologique a été détecté en ré-analyse sur un enregistrement d’octobre 2016 en Colombie Britannique.

Propagation météo-tsunami. Crédits : B. DOMPS © Propagation météo-tsunami. Crédits : B. DOMPS

Ces travaux de recherche se sont aussi intéressés au contexte atmosphérique : ainsi, la méthode « TVAR-MEM » développée a été appliquée aux abords des pistes d’atterrissage de l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle à l’aide d’un profileur de vent. Le profileur de vent était installé à 10 km de la piste d’atterrissage, à l’aplomb de la trajectoire d’approche, mais n’avait pas pour vocation de mesurer des sillages.  Les données du profileur ont toutefois été utilisées pour tester le traitement TVAR-MEM, sur des séries temporelles de l’ordre du dixième de seconde (contre une quinzaine de secondes pour le traitement standard). Dans le cadre de ces premiers essais, une représentation Temps-Fréquence a permis de visualiser l’évolution du contenu fréquentiel des signaux rétrodiffusés, analysés par TVAR-MEM. Ces premiers résultats sont très encourageants et démontrent l’intérêt du TVAR-MEM pour la réalisation de mesures atmosphériques.

Echos atmosphériques. Crédits : B. DOMPS © Echos atmosphériques. Crédits : B. DOMPS

Plusieurs collaborations scientifiques émergent à la suite de cette thèse. Une première, dans le contexte de la détection de tsunamis et d’ondes de tempêtes, est en cours avec l’Université de Townsville (Australie). Une deuxième concerne les applications atmosphériques (mesures de turbulences) évoquées et anti-drones ou anti-furtifs. Enfin, une troisième porte sur l’utilisation de mesures de courant à la surface de la mer par radar à synthèse d’ouverture (SAR) spatial, en combinaison avec des mesures par radar au sol. L’entreprise d’accueil Degreane Horizon et le laboratoire MIO souhaitent poursuivre leur collaboration dans ces différents objectifs.

 

Ingénieur diplômé en électronique de Bordeaux INP – ENSEIRB-MATMECA (2018), Baptiste est depuis janvier 2022 responsable « Radars et innovations » chez Degreane Horizon, PME du groupe Vinci Energies basée à Cuers, dans la périphérie de Toulon. Baptiste est notamment chargé du développement de nouvelles générations de radars pour l’observation environnementale et les applications de défense.

 

 

 

1-Cette nouvelle méthode se base sur une représentation polynomiale autoregressive (AR) des séries temporelles radar, dont les coefficients sont obtenus en utilisant un critère connu sous le nom de « méthode de Burg » ou « méthode à entropie maximale » (MEM). Ces coefficients sont utilisés pour calculer la densité spectrale de puissance (PSD) puis en déduire la fréquence Doppler ou la vitesse. Cette approche a montré son intérêt pour l’estimation de courants de surface à partir de séries temporelles de l’ordre de 30 s, là où le traitement classique à transformée de Fourier exploite des séries de l’ordre de 20 min.


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