Matthieu GUEMANN, l’auteur d’une avancée scientifique à destination des patients amputés du membre supérieur
Après plusieurs années de pratique clinique en kinésithérapie, deux masters de recherche clinique en rééducation, en sciences cognitives et un diplôme universitaire de statistiques appliquées à la recherche, Mathieu Guemann décide en 2016, de démarrer une thèse de science. Celle-ci porte sur l’étude des modifications du contrôle sensorimoteur sur prothèse myoélectrique(1) du membre supérieur, d’un point de vue neurophysiologique(2). Une expérience scientifique soutenue par la Direction générale de l’armement (DGA), qui affiche des résultats remarquables.
La perte d'autonomie engendrée par l'amputation du membre supérieur touche souvent, en France, une population jeune et active. Les répercussions sur le plan physique et psychologique en font une problématique à la fois clinique, technique et scientifique. La faible prévalence de l'amputation du membre supérieur fait qu'elle est considérée comme une pathologie orpheline. Malgré les progrès technologiques et les multiples fonctionnalités apportées par les prothèses de dernière génération, la commande de ces outils reste complexe. Elle demeure contre-intuitive et limitée car chaque fonctionnalité doit être activée de manière séquentielle (c’est à dire une par une). Un mouvement simple comme attraper un objet, doit être scindé en une multitude d’étapes et d’actions avec la prothèse. Cette lourdeur de process est un des facteurs qui engendre un taux d’abandon élevé et donc une diminution de la qualité de vie des personnes amputées.
Une thèse pour faciliter le quotidien des patients
L’objectif de la thèse a été d’identifier des solutions concrètes au profit de patients et soldats victimes d’amputation du membre supérieur.
Les pistes de recherche devaient aider les victimes à (1) améliorer l’utilisation quotidienne de leur prothèse, (2) se rapprocher au maximum d’une commande naturelle et (3) diminuer les douleurs du membre fantôme qui sont présentes chez plus de 70% des patients. Pour être pleinement fonctionnelle, la prothèse myoélectrique idéale devrait pouvoir générer des réponses réflexes et redonner une sensorialité perdue.
Durant cette thèse, l’exploration de Matthieu Guemann s’est portée sur les deux aspects que sont les comportements réflexes d’une part et la substitution sensorielle d’autre part.
Matthieu a commencé par étudier la régulation des commandes motrices du bras lors de l’exécution d’un mouvement. Ceci a permis d’établir un lien entre les commandes descendantes basiques telles que les enregistrements d'activité musculaire (EMG) et les mouvements produits par les moteurs de la prothèse. L’approche choisie a le potentiel de produire des réponses réflexes.
La deuxième partie du travail de Matthieu concerne l'étude de la substitution sensorielle. Un bracelet produisant des stimulations vibrotactiles a été développé spécifiquement pour cette expérience. Il permet de donner aux sujets les informations de position angulaire du coude virtuel, et ainsi de positionner leur bras virtuel dans l’espace. Les expérimentations ont mis en évidence des résultats prometteurs en termes de discrimination spatiale chez des patients amputés mais aussi chez des sujets sains. Ceci a ensuite été utilisé dans un contrôle en ligne d'un bras virtuel où les vibrations permettaient de donner des repères spatiaux dans une tâche d'atteinte de cibles.
Cette seconde série d’expériences a révélé que le feedback proprioceptif(3) permettait d'améliorer la performance par rapport à une condition sans feedback. Le contrôle en présence de deux feedbacks (vibratoire et visuel) a été le plus apprécié des sujets. Ce travail a permis d'enrichir les connaissances autour de la commande des prothèses myoélectriques avec toujours pour objectif de se rapprocher le plus possible du contrôle naturel du membre appareillé.
Des résultats plus qu’encourageants :
Matthieu GUEMANN a soutenu sa thèse à l’université de Bordeaux le 2 décembre 2019. Un système de commande d’un bras virtuel associé à un bracelet vibrotactile a été développé permettant de recréer l’information de l’angle du coude en temps réel lors du mouvement de l’avatar simulant la prothèse.
Les exercices mis en place ont été très appréciés par les patients. Une diminution des douleurs du membre fantôme a été constatée dans certains cas. L’utilisation des retours sensoriels vibrotactiles permet des résultats significativement meilleurs qu’en situation sans bracelet vibrotactile.
L’ensemble des projets du domaine Hommes et Systèmes sont menés en étroite collaboration avec le service de santé des armées (SSA). Ils s’inscrivent dans une logique de réadaptation du soldat et du civil blessé. Des applications aux patients victimes d’un AVC pourraient également en découler, ainsi que des applications militaires pour interagir avec des exosquelettes actifs.
Grâce à ces travaux, Matthieu Guemann est aujourd’hui Docteur en sciences cognitives et travaille toujours au sein de l’Institut de Neurosciences Cognitives et Intégratives d’Aquitaine (INCIA). Son ambition de chercheur ne s’arrête pas là. Il poursuivra son parcours avec l’Agence de l’innovation de défense (AID) grâce à une année postdoctorale qui lui permettra de continuer à développer ce bracelet vibrotactile afin d’améliorer l’apprentissage et l’utilisation des prothèses. Il pourra également compter sur le soutien de BPI France, en récompense à sa participation au concours d’innovation i-PhD. En tant que Lauréat, il bénéficiera d’une offre de service sur 12 mois comprenant un programme de mentorat par des entrepreneurs et industriels ainsi qu’une formation destinée aux chercheurs entrepreneurs.
Ce projet est l’exemple même qu’une thèse appliquée peut donner lieu à un produit commercialisable. Cet amorçage correspond parfaitement à la mission de l’Agence d’accompagner la recherche pour l’obtention de résultats concrets et exploitables opérationnellement.
1*Une prothèse myoélectrique repose sur des électrodes basées à l’intérieur de l’emboîture. La contraction des muscles crée une tension électrique que l’électrode amplifie au contact de la peau permettant la mise en mouvement de la prothèse.
2*La neurophysiologie est l’étude des fonctions du système nerveux à tous les niveaux.
3*Proprioception : la proprioception désigne la perception, consciente ou non, de la position des différentes parties du corps. Il s’agit ici d’un retour d’information sur la position du bras du patient.
Droits : AID
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