La guerre urbaine
Depuis le début du XXIe siècle, les zones urbaines ou péri-urbaines semblent s’imposer comme un théâtre privilégié d’opérations militaires et d’affrontement.
La lutte contre Daech a donné lieu à d’acharnés combats dans des villes de Syrie et d’Irak, la guerre civile en Libye a été rythmée par de nombreuses batailles dans les principales agglomérations du pays tandis que, tout récemment, la guerre en Ukraine met en lumière la stratégie de l’armée russe qui encercle, bombarde et rase de grandes villes ukrainiennes sans aller toutefois jusqu’à les occuper. A l’heure du retour de la haute intensité, ce Biblioveilles est l’occasion de mettre en lumière des éléments de doctrine et des enseignements tactiques de la guerre dans les villes, ainsi que certains enjeux et spécificités de ce terrain complexe.
DUFOUR, Jean-Louis. La Guerre, la ville et le soldat, Paris, éditions Odile Jacob, 2002
« Engager délibérément la bataille dans une agglomération est un comportement militaire plutôt rare. Exceptionnel jusqu’au XXe siècle, ce type d’affrontement se multiplie pourtant depuis lors » (p.143)
« La guerre aux villes consiste pour le soldat à détruire en partie ou totalement les agglomérations ennemies sans pour autant les occupe. » (p.217)
« Le bel avenir de la guerre en ville » (p.263)
Dans cet ouvrage relativement pionnier en langue française, le colonel Dufour, longtemps attaché militaire à Beyrouth, exprimait de manière aiguë et en tant que polémologue l’ambivalence des militaires à l’égard de la guerre urbaine. Il observait que l’urbanité ne s’accorde pas avec la guerre et, s’inscrivant dans la lignée de Clausewitz, recommandait une stratégie directe contre l’armée adverse, à moins que la capitale ennemie ne soit le centre de gravité. Les déterminismes lui paraissaient à proscrire, tels que les liens urbanisation/guerre urbaine/avantage à la défense. A l’opposé du spectre éthique, des milices retranchées dans leur quartier peuvent se combattre comme il l’avait observé à Beyrouth ; elles se concurrencent alors pour le pillage des biens et s’entendent pour nuire aux civils.
L’idée de bombarder les villes pose la question de la lutte antiforces ou anti-cités. Avec les armes de précision, la guerre « n’est plus la poursuite de la politique par d’autres moyens, elle est la politique elle-même ». Aux yeux de l’auteur, la reproduction des événements de Beyrouth pouvait intervenir dans des mégapoles mal gouvernées, où des interactions complexes avec les États extérieurs se produiraient. Les villes multiculturelles seraient plus faciles à prendre qu’à administrer, contrairement à des villes hiérarchisées comme Paris. Le pire serait en revanche à attendre des villes tribales où s’affrontent des clans dont les membres sont difficilement identifiables et leurs motivations incompréhensibles. La présence de soldats professionnels s’imposerait donc, dont le faible nombre serait compensé par le recours à des civils ou à des sociétés privées.
FREMONT-BARNES, Gregory (ed.). A History of Modern Urban Operations, Cham, Palgrave Macmillan, 2020
« We must work out how to operate in the future urban environment and maximize our capabilities at a time of diminishing military strength » (p.358)
Maître de conférences au département de War studies de l’académie royale militaire de Sandhurst au Royaume-Uni, G. Fremont-Barnes a fait appel à de nombreux contributeurs pour cerner les spécificités tactiques des combats en milieu urbain et en dégager les facteurs de succès ou au contraire d’échec. Onze chapitres détaillent ainsi plusieurs études de cas historiques du XIXe au XXIe siècle débutant, dont les batailles de Shanghai (1937), de la Seconde Guerre mondiale, d’Alger (1957), de Hué et Saigon (1968) ou encore celle de Falloujah (2004). Elles sont autant d’occasions de mettre en lumière la nature tridimensionnelle de la guerre urbaine, qu’il s’agisse des champs de tir et de vue généralement restreints, des avantages procurés par les positions dissimulées et une couverture abondante pour le défenseur, ou des lourdes pertes qui en résultent invariablement.
Le dernier chapitre se concentre quant à lui sur les défis majeurs de la guerre urbaine au XXIe siècle. Il s’attarde sur le futur environnement opérationnel des armées tel qu’il a été envisagé à trente ans par le ministère britannique de la Défense dans plusieurs documents de référence publiés depuis 2009. Il y tient compte du contexte d’urbanisation galopante et d’explosion démographique à l’échelle mondiale, du changement climatique, de la révolution technologique et des questionnements éthiques qui lui sont liés. Cet environnement opérationnel est ainsi évalué comme « surpeuplé, encombré, disputé, connecté et contraint ». Il oblige de ce fait les militaires à appréhender et à comprendre la complexité des villes modernes en plaçant les habitants, la taille, l’hyperconnexion et le caractère multidimensionnel de l’environnement des villes de demain au cœur de leur analyse prospective.
LOBRY, Dorothée. Les Interventions militaires en zone urbaine. Enjeux et défis, Paris, Éditions du Cygne, 2019
« Désormais, la majorité des combats a lieu dans les villes, que ce soit en vue de leur contrôle ou de leur destruction » (p.32)
« En zone urbaine, on estime que le combat représente du 1 contre 6 ou 10 tandis qu’une zone ouverte affiche du 1 contre 3 » (p.72)
Docteur en stratégie militaire, l’auteur est aussi capitaine de réserve au Centre de doctrine et d’enseignement du commandement (CDEC). Après avoir brossé un tableau des enjeux du terrain en général et du milieu urbain en particulier comme théâtre des opérations militaires, singulièrement pendant la Seconde Guerre mondiale puis de manière privilégiée au XXIe siècle, l’ouvrage s’attarde sur l’exemple français du centre d’entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB). Créé en 2006 à partir d’une réflexion née de la guerre du Kosovo, cette infrastructure au caractère ultra-réaliste est également contemporaine de la publication en 2005 du Manuel d’emploi des forces terrestres en zone urbaine de l’armée française. Le budget de 80 millions d’euros dépensés et les dix ans de chantier ont permis à la France de disposer d’un instrument digne des pays comparables et à la hauteur des défis spécifiques et des fortes exigences du combat en milieu urbain : tridimensionnalité, proximité, intérêt des médias. L’action des militaires ne se limitera pas au combat : ils devront aussi assurer la protection des civils et la gestion du post-conflit.
6 000 hectares sont ainsi dédiés au CENZUB qui comprend le village de combat Beauséjour, la ville de combat Joffrecourt arrosée par une rivière et le système de simulation SYMULZUB, que remplacera avantageusement CERBERE ; un métro y est même en construction. Un état-major et trois compagnies animent des formations qui durent quinze jours : la première compagnie, dite FORAD (forces adversaires), « réactive et agressive », interarmes, établit le scénario d’après des retours d’expérience (retex) d’armées françaises ou étrangères ; la deuxième compagnie, AZUR, observe et évalue les performances tactiques des stagiaires, l’analyse après action (3A) s’appuyant sur les vidéos réalisées ; l’anticipation enfin est du ressort du pôle Études et prospective du CDEC, à travers par exemple l’étude des « smart cities ».
CDEC. « Le Combat en zone urbaine à l’horizon 2035 » Cahier de la prospective, 2e trimestre 2018
« Pour conclure, si nous ne devions retenir que trois défis majeurs de l’action en zone urbaine, ce seraient : celui de la connaissance et de la compréhension ; celui de la mobilité ; et celui de l’agression contrôlée » (p.45)
Dans cette étude du Centre de doctrine et d’enseignement du commandement, la bataille de Mossoul (17 octobre 2016-10 juillet 2017), qui a opposé la Coalition à Daech, un adversaire « manœuvrier et innovant » auquel il a fallu répliquer par des armes de précision et d’appui à la mobilité, apparaît comme une bataille instructive en terme deprospective. A l’avenir, les combats se dérouleront souvent dans des mégapoles, certes, mais aussi des villes de petite et moyenne taille. Il faudra savoir contrôler des bidonvilles, des zones littorales et des systèmes numériques denses, c’est-à-dire des lieux peuplés et complexes, hostiles à l’attaquant.
L’ennemi sera irrégulier, hybride ou étatique. Les modes d’action ne devraient pas fondamentalement changer sauf à faire descendre l’autonomie jusqu’aux plus bas échelons. La réflexion approfondie et la préparation de l’intervention seront nécessaires mais requerront du temps. Pour obtenir les capacités d’agilité, d’influence et d’endurance, mais aussi de performance au commandement, de coopération et de force morale, d’énormes efforts devront être mis en œuvre en mettant l’homme au centre, aptitudes que l’armée de Terre possède déjà.
SANTONI, Pierre. « La Ville, champ de bataille d’hier à demain », Politique étrangère, 3/2020 (p.153-165)
« Grozny puis Fallouja sonnent comme un coup de tonnerre pour les armées russe et américaine. Alors que leur puissance est indiscutable sur le champ de bataille ouvert, elles doivent s’engager dans de terribles combats de rue face à des adversaires certes légèrement armés mais extrêmement déterminés » (p.153)
« Il est difficile de dire ce qui se passera demain, mais celui qui saura combiner leçons de l’histoire et avantages techniques aura le plus de chances de rester maître du champ de bataille urbain » (p.165)
Le colonel Pierre Santoni, qui a servi dans l’infanterie sur les théâtres extérieurs, a commandé le Centre d’entraînement aux actions en zone urbaine (CENZUB) à Sissonne dans l’Aisne.
A ses yeux, la préférence des Occidentaux pour les batailles « par consentement mutuel », généralement situées en champ ouvert, leur mépris des sièges et de la poliorcétique, leur crainte des émeutes urbaines et des barricades au pouvoir égalisateur risquent d’être battus en brèche par le développement des combats de rues qui se multiplient depuis celui de Madrid en 1936. Si la guerre urbaine présente un profil classique, comme à Mossoul en 2016 où Daech avait organisé et armé une force quasi-conventionnelle, il faut engager des effectifs très nombreux comme l’ont fait les Forces de sécurité irakiennes et accepter 30 % de pertes. En revanche, la bataille d’Alep, pendant la guerre civile syrienne, ressemblait aux guerres de châteaux-forts et a duré très longtemps, jusqu’à ce que des forces considérables et un appui étranger permettent au régime syrien de reprendre le contrôle de la cité. Le troisième modèle, celui de Hué en 1968 et Bombay en 2008, repose sur la tactique d’infiltration discrète d’un petit groupe apte à semer massivement la mort.
Du point de vue tactique, le défenseur a l’avantage dans des combats qui atteignent la haute intensité. « La ville recrute ses combattants sur place », combattants qui sont souvent des délinquants en bandes redoutées par les civils qui se terrent chez eux. « La robotisation pourrait être une solution ».
CHAMAUD, Frédéric. SANTONI, Pierre. L’Ultime champ de bataille. Combattre et vaincre en ville, Éditions Pierre de Taillac, 2019
« L’objet de notre étude porte sur la ville ou tout autre espace confiné, organisé pour le combat. Il peut s’agir d’un réseau de grottes, de souterrains, de tunnels » (p.13)
« En attaque, le rapport de force idéal est de dix contre un. Or, il est très rare de disposer d’un tel avantage numérique. Il faut donc essayer de l’avoir localement ou à un moment donné » (p.43)
Le lieutenant-colonel Chamaud, issu des troupes de marine, fait bénéficier le lecteur de son expérience opérationnelle et au CENZUB. Avec le colonel Santoni, ils revendiquent également leur fréquentation assidue et approfondie de revues et d’ouvrages d’histoire militaire. Selon eux, la ville sera l’ultime champ de bataille par son « pouvoir égalisateur de technologie » qui remettra à l’honneur la « tactique pure » et la manœuvre. La zone urbaine en conflit comprendra de nombreux micro-théâtres qui requerront l’engagement d’unités interarmées au plus bas niveau et soumises à un stress intense. La bataille de Fallouja en 2004 est une référence en matière de combat en zone urbaine ou confinée ; elle illustre l’attaque en « râteau ». Budapest fut quant à elle le lieu d’une attaque soviétique en « coup de poignard » en 1944-45. Les Français procédèrent à une attaque en « ciseaux à œuf » dans la Rue sans joie, un village fortifié en Indochine en 1953. Cette opération Camargue relevait du « bouclage-ratissage » en vigueur en Afghanistan récemment et vécu par l’armée de Terre américaine à Aix-La Chapelle en 1944. La propagande soviétique a mythifié Stalingrad mais l’examen tactique opéré plus tard par le colonel américain David Glantz, montre que le général Tchouïkov mena une défense de l’avant, très coûteuse en hommes, pour gagner du temps avant le déclenchement de l’opération Uranus le 19 novembre 1942, fait d’armes réellement décisif s’étant produit quant à lui en zone ouverte.
Le défenseur n’a pas forcément la supériorité dans le combat urbain. En tout cas, le combat urbain présente nombre de spécificités qu’une expérience générale ne suffit pas à maîtriser : l’entraînement dans des dispositifs de type CENZUB est essentiel, de même que le facteur temps. Le commandement doit être décentralisé, hors des habitudes des Occidentaux, ce que la simulation peut enseigner. Le niveau particulièrement élevé de stress à subir en des lieux cloisonnés requiert une préparation psychologique minutieuse. Les chars ont aussi toute leur place, comme ceux qu’utilisèrent les Israéliens au Liban en 1982. L’armée britannique est restée longtemps en Irlande du Nord où cette « guerre de caporal » et non « de général » a été gagnée grâce à l’instauration de patrouilles. Pendant dix ans, de 1999 à 2009, une force composée principalement de Français a réussi à maintenir l’ordre à Mitrovica en respectant les droits de la personne, alors que la moindre erreur aurait eu des répercussions énormes, notamment médiatiques. La technologie se révèle utile à condition de bien réfléchir au concept d’emploi en fonction du contexte, de procéder au choix, encore plus crucial en milieu confiné, entre mobilité et protection des chars, d’autant par exemple que le Hezbollah ou, à sa suite, les Palestiniens, maîtrisent très bien les armes antichars. Les affrontements souterrains et le risque chimique doivent être plus qu’ailleurs envisagés.
Dans les mégapoles, la question du nombre se posera, l’adversaire deviendra symétrique, l’attaqué se fera attaquant, la manœuvre classique sera pertinente.
KING, Anthony. Urban warfare in the twenty-first century, Polity press, 2021
« While the details of each battle are different, urban warfare consists of three fundamental elements: cities, weaponry and forces » (p.15)
« State forces are so much smaller now than previously that they will converge on decisive urban terrain » (p.40)
Le sociologue de la guerre Antony King, professeur à l’Université britannique de Warwick, constate que partout dans le monde beaucoup des batailles du XXIe siècle sont le plus souvent urbaines. Ces guerres urbaines changent d’anatomie du fait de la réduction de format des armées. Les hostilités se déroulent en certains points de l’agglomération et s’étendent à « l’archipel urbain mondial ». Les insurrections du XXe siècle furent principalement des faits ruraux même si les théoriciens mettaient l’accent sur les villes.
De nos jours, les villes s’étendent et se complexifient si bien que les stratèges les comparent à des organismes malades requérant des interventions chirurgicales en vue de recouvrer santé et stabilité. Ce sont en réalité des émanations de leurs habitants, fondamentalement politiques et changeantes. Les fortifications, traditionnellement externes, séparent maintenant des quartiers. Les opérations aériennes ont pour principe moins l’attrition que la précision quand la cartographie informe le feu, ce qui n’enlève rien à la brutalité des attaques. La « manœuvre fractale » qui se jouerait des limites imposées par le théâtre urbain suscite l’enthousiasme des théoriciens contemporains mais c’est plutôt Thomas-Robert Bugeaud (La Guerre des rues et des maisons, Paris, J-P. Rocher, 1997) qui inspire les combattants réduits à ramper de maison en maison. Loin de l’instantanéité prédite par Paul Virilio (Ville panique : ailleurs commence ici, Paris, Editions Galilée, 2004), le siège interminable est de retour. Ce sont les chars, trop tôt jugés dépassés, qui procurent la mobilité en écrasant les obstacles. Par ailleurs, des soldats en nombre insuffisant peuvent quand même agir dans des villes hétérogènes en s’alliant avec certaines forces locales.
BELL, Andrew. M. « Civilians, urban warfare, and US doctrine », Parameters, hiver 2020 (p.33-45)
« The most salient aspects of this emerging warfare challenge : the presence of large-scale civilian populations within the battlespace, the likelihood of mass civilian casualties resulting fr0m such warfare, and the implications of these factors for military operations » (p.33)
Docteur en science politique et assistant en études internationales à l’Université d’Indiana, l’auteur de cette étude s’intéresse à l’urbanisation croissante. L’armée américaine a édité la Joint publication Urban operations en 2017. Sa doctrine se recentre sur l’ennemi et non plus sur la population, afin de l’emporter dans un conflit de haute intensité. Les derniers conflits urbains ont été particulièrement meurtriers pour les civils et toute négligence à leur égard peut avoir des répercussions stratégiques en termes de réputation morale. Du point de vue opérationnel et tactique, la protection des civils ajoute donc une exigence à celles de l’avantage militaire et de la protection des forces. A cet égard, assister à la souffrance et à la mort de civils peut induire des cas de stress post-traumatique chez les soldats.
Analysée de manière critique par la RAND Corporation en 2017, la doctrine américaine s’abstient de tenir compte des derniers affrontements et reste trop vague au sujet des civils car elle a pour présupposé d’éviter les théâtres urbains ou de faire évacuer les civils. Cela pourrait inciter les adversaires à se retrancher dans les villes pour maximiser les avantages asymétriques et la doctrine mériterait être complétée en ce sens. Les trois lieux d’entraînement au combat urbain pour l’armée américaine ne sont pas à la hauteur de la complexité et de l’échelle du phénomène. La préparation psychologique des combattants requiert et retient en revanche l’attention prioritaire du département de la Défense, lui-même faisant appel à des spécialistes de toutes disciplines. En tout état de cause, la question de l’avènement des opérations urbaines majeures n’est plus « si » mais « quand ».
KONAEV, Margarita. « Urban warfare and violence in the 21st century », Focus stratégique n°88, IFRI, mars 2019
« We have also witnessed meaningful advances in global norms and policies governing the protection of civilians in conflict since the 1990s » (p.11)
« Partly because urban warfare favors the defender over the attacker, fighting for and in cities can be extremely manpower intensive, costly, and time-consuming » (p.30)
Selon Margarita. Konaev, docteur en science politique qui enseigne notamment à West Point, les mégapoles de plus de 10 millions d’habitants représentent un défi pour les armées professionnelles aux effectifs réduits. Les technologies émergentes, dont les médias sociaux et les drones, sont favorables aux groupes non étatiques tandis que les technologies sophistiquées des armées occidentales ne leur permettent pas d’éviter les dommages collatéraux, quand bien même certains de leurs adversaires dépourvus de scrupules vont jusqu’à attaquer délibérément les civils. De plus, les infrastructures urbaines sont intriquées, c’est-à-dire utilisables par les civils et les groupes armés. La violence étant omniprésente dans les mégapoles, le recours aux militaires pour le maintien de l’ordre peut de ce point de vue représenter un remède pire que le mal. La lutte contre la violence doit impérativement revêtir un caractère multidimensionnel.
PRIVAT, Marc-Emmanuel. « Guerres en ville, villes en guerre aux XXe et XXIe siècles. La Guerre rattrapée par la ville », DSI, n°155
« Il est indispensable de mieux préparer les populations urbaines aux actes de guerre » (p.69)
Officier de l’armée de Terre et architecte, Marc-Emmanuel Privat offre un pont de vue original en adoptant des définitions larges de la guerre et la ville. Il explique la répulsion traditionnelle des soldats pour ce terrain d’intervention par le piège qu’il représente et le « renversement des perspectives entre pleins et vides : tout espace ouvert est source de danger pendant que tout espace fermé est a contrario le gage de déplacements en sécurité ». A la différence du baron Haussmann, très bien conseillé par des maîtres en « anticipation constructive », les urbanistes de la période contemporaine se sont inspirés du modèle américain « criminogène et belligène » de la dalle, un « entrelacs de glacis, escaliers, demi-niveaux et espaces semi-enterrés ».
Si le terrorisme est un défi très complexe pour la protection de l’espace public, quelques mesures simples peuvent réduire les vulnérabilités, par exemple des solutions de continuité dans les espaces ouverts, la difficulté étant alors de gêner les perturbateurs tout en aidant les alliés.
(N.B. : toutes les références citées sont consultables au CDEM)
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