Quels avantages revêt le nouveau portail météorologique interarmées, conçu par la DIRISI depuis un an et demi ? Immersion, non pas dans les secrets de l’atmosphérique, mais dans un projet stratégique qui a rassemblé les synergies de 3 sections et dont les précieux services guident « pas à pas » nos soldats de par le monde.

Cellule Communication : Lieutenant, vous avez présenté il y a peu ce portail à Madame la Ministre, venue dans la région pour inaugurer le datacenter flambant neuf. Pourquoi avoir choisi cette solution informatique plutôt qu’une autre ?

Lydie : Je ne suis à l’origine ni du choix du projet à mettre en exergue ni du lancement du projet d’ailleurs. Je tiens à préciser que de par ma fonction originelle j’étais prévisionniste météorologiste en lien direct avec les pilotes de l’armée de l’Air, et je suis venue il y a deux ans à la DIRISI dans un métier tout autre : la conduite de projets informatiques. J'en supervise aujourd'hui une dizaine. Le portail météo de la DIRISI a été lancé en 2017 et n’a été validé définitivement après tests qu’en mars 2019. Quand je suis arrivée ici, le portail était déjà utilisé en V1.Lorsque j’ai géré la V2 du portail, j’exploitais informatiquement les données météo qu’autrefois je maniais et calculais. Ma formation et ma spécialité en météorologie me confèrent une certaine légitimité pour expliquer à des tiers les spécificités et atouts du portail.

Quels sont ses atouts par rapport à des sites météo civils ?

Le premier atout est que le client [celui qui a un besoin identifié sur un lieu précis et une heure précise] bénéficie de prévisions plus précises et plus fiables car les données brutes fournies par Météo France sont analysées, modifiées et contrôlées par des prévisionnistes militaires des trois en cohérence, en pertinence et en justesse afin de détecter une éventuelle anomalie. Pour comprendre la valeur ajoutée du PMIA, sachez que l’on trouve sur internet des données météo en Open Source qui sont modifiables à l’envie, et cette potentielle inexactitude est un danger impensable dans le cadre des missions opérationnelles de nos forces.

Le deuxième atout est que les données fournies par PMIA sont littéralement personnalisées selon que le besoin vient d’un parachutiste, d’un pilote de drone ou d’hélicoptère.

Enfin, les données sont accessibles vraiment par tous les utilisateurs du ministère via l’Intradef : vous pouvez consulter la météo pour divers motifs qu’ils soient d’ordre personnel (votre barbecue, votre mariage) ou professionnel (votre saut en parachute, votre mission pour la posture permanente de sûreté, votre mission au sein de la patrouille de France le 14 juillet). Le portail délivre au client un « produit » issu de l’expertise de Météo-France ou des prévisionnistes militaires. Celui-ci prend différentes formes : carte, bulletin, matrice d’impact, … Nous y retrouvons des informations telles que la pression atmosphérique, la température, la force et la provenance du vent, l’état de la mer, la température de la mer, les phénomènes dangereux tels que la turbulence ou le givrage. Le givre, par exemple, est redoutable car il peut endommager tous types d’aéronefs dépourvus de système de dégivrage ou perturber la visibilité d’un pilote. Les traînées de condensation, appelé « COTRA » sont également un danger pour les militaires en vol car ils permettent de repérer non seulement la position de l’avion mais également sa trajectoire.

Le projet a été conçu en 18 mois ; sur quelles compétences et synergies de la DIRISI s’est-il bâti ?

Le projet a requis le travail à plein temps de 3 développeurs informaticiens de la DIRISI pilotés par un chef de projet informatique – lui-même en lien constant avec les référents métier [experts météorologistes] au nombre de 3, un pour chaque corps d’armée. Ils sont issus pour l’armée de l’air : du Centre Météo des Opérations Aériennes (CMOA), pour l’armée de terre, de la Section Technique Armée de Terre (STAT), pour la marine, du Centre Expertise en Météorologie Océanographie de la Marine (CENTEX METOC). Et un 4e référent du Centre Interarmées de Soutien Météo Océanographique des Forces (CISMF) pour les données concernant les opérations extérieures interarmées [NDLR : à l’étranger] assure la liaison avec Météo France. Toutes ces parties prenantes étaient pilotées en amont par un 5e référent du Bureau Géographie, Hydrographie, Océanographie, Météorologie (BGHOM), garant de l’avancement de A à Z du projet.

Le portail est le résultat du travail collaboratif de 3 sections du CDAD. D’abord la section développement qui a assuré la réalisation du logiciel, puis la section ASMQ qui administre les plateformes de développement du centre, et enfin la section « informatique décisionnelle » qui gère les statistiques de navigation du portail pour- par exemple - mettre en valeur les produits les plus utiles ou ceux méconnus mais importants comme les données sur les tempêtes de sable…

En aval, le Centre National de Mise en Œuvre des Systèmes d’Information (CNMO-SI) de Bordeaux héberge le portail PMIA.

Le « produit » phare de la solution numérique PMIA développée par la DIRISI et consulté par les personnels Armées en mission

Qu’est-ce qui fait le succès d’un projet comme celui-ci ?

Le succès d’un projet est d’abord porté par l’enjeu du besoin : là, il s’agissait d’un réel besoin de la part des clients. Un tel projet ne doit pas échouer, car au bout il y a la vie d’hommes, de femmes au service de la Nation ! En effet, la météo a souvent influencé le déroulement de guerres ou de batailles, comme nous avons pu le constater lors de la bataille de Waterloo ou de la première guerre mondiale. Les équipes se sont donc senties investies d’une mission forte. En tant que chef de 10 projets informatique je peux affirmer qu’une équipe très motivée est un ingrédient essentiel pour une collaboration rapide et efficace. En 2017, les développeurs sont allés sur place au Centre Interarmées de Soutien Météo-océanographique aux Forces (CISMF) pour voir comment fonctionnait la passerelle entre Intradef et Météo France. Par la suite, si l’équipe de développement avait une question, elle téléphonait et obtenait sa réponse quasi immédiatement. Rencontrer les gens avec lesquels on travaille aide à mieux communiquer. Aujourd’hui, à cause de la distanciation imposée par la crise covid, les réunions se font par Skype, par téléphone ou par mail. On avance bien malgré tout, on s’adapte.

Un autre ingrédient du succès, le dernier mais pas le moindre : le cahier des charges était très clair, le client savait vraiment ce qu’il voulait.

A titre personnel, quelle est votre fierté ?

Le projet a abouti, même si je n’étais pas à la commande, les clients sont satisfaits. Trois sections sur quatre ont œuvré.

De manière plus générale, être chef de projet apporte beaucoup de diversité renouvelée sur les domaines rencontrés. Les DIRISIens des CDAD découvrent les métiers des autres par le biais de la construction de projets : on sort du domaine informatique pur pour plonger dans un autre univers, celui du client.