Les industriels de la Marine, le courant passe bien

À la table de la dronisation, les industriels ont une place de choix. Ils ont présenté leurs produits au Dronathlon et embarqué avec les marins sur le porte-hélicoptères Tonnerre pour la première édition de l’exercice Dragoon Fury. Une proximité inédite et nécessaire pour adapter les innovations des industriels aux besoins opérationnels des marins. 

Les industriels de la Marine © M. Delannoy / MN

Les industriels de la Marine

DELAIR

STEPHAN GUÉRIN

Chef des ventes pour les marchés civils et de défense marine

Quelles sont les caractéristiques du DT46 ?

STEPHAN GUERIN : Le DT46 est la 5e génération de drone Delair capable de décoller verticalement et il a profité de notre retour d’expérience en Ukraine. Pour intégrer le drone à la Marine, il fallait le mariniser (résister à un environnement maritime) et le navaliser (capacité à apponter et décoller d’un bâtiment en mouvement à la mer). Cela implique d’être compatible avec les systèmes de gestion des drones du bateau et avoir une antenne omnidirectionnelle. L’idée est d’avoir un drone rapide à mettre en place qui puisse être opéré depuis le central opérations, avec une élongation de 100 km, capable de se gérer automatiquement et de voler à plusieurs sur les mêmes fréquences. En plus de ses capacités opérationnelles, l’avantage du DT46 est son silence.

Comment le retour d’expérience nourrit-il l’innovation des ingénieurs ? 

S. G. : Nous sommes fast and serious, si on n’est pas alimenté, on passe à autre chose. Si on n’occupe pas notre espace, quelqu’un d’autre vient l’occuper. La Marine et l’armée de Terre l’ont compris. Le dialogue est capital, nous avons une chance folle de bénéficier rapidement de retours d’expériences de la Marine. Je suis très impressionné et sensible à la capacité des marins à s’adapter, c’est de l’essence dans notre moteur qui nous pousse à avancer.

Comment prendre en compte la rapidité de l’évolution technologique pour que le drone ne soit pas obsolète trop rapidement ? 

S. G. : Notre business model n’est pas de vendre de la pièce détachée plein fer après avoir vendu un drone. On fait de la fabrication additive avec une licence perpétuelle très peu coûteuse par exemple sur nos drones sous-marins. Notre produit doit être évolutif et ne pas s’autolimiter : c’est dans notre ADN. Nos drones sont pensés pour être multicharges dès le départ pour que demain ils puissent passer de la guerre électronique passive à de la guerre électronique active. 



 

COUACH

YANN HUORT 

Responsable du développement commercial Europe 

Comment est né votre projet de drone ? 

YANN HUORT : L’USV Magellan est le fruit de notre propre recherche. Nous voulions être cohérents sur le secteur du drone avant de discuter avec de futurs partenaires. Nous sommes partis d’une page blanche pour créer un produit qui est un assemblage de briques technologiques réutilisables sur d’autres projets. Nous avons ajouté des contraintes : le drone devait être hautement modulable avec une propulsion innovante et entrer dans un conteneur de vingt pieds. 

Un moment marquant de Dragoon Fury ? 

Y. H. : Le débriefing fait avec le commandant, le commandant en second et l’officier de manoeuvre nous a permis de bénéficier de retours très positifs et même élogieux (sourire). Ce sont des retours extrêmement importants et motivants pour les équipes. Les exercices comme Dragoon Fury permettent d’exprimer les besoins des uns et des autres. Nous apportons des idées à la Marine et recevons en retour des directives afin de mieux orienter le développement de nos produits. 

Comment le retour d’expérience des marins nourrit-il l’innovation des ingénieurs ? 

Y. H. : Nous ne sommes pas à la place des marins, donc nous ne pouvons pas formuler leur expression de besoins. En revanche, nous avons tout un panel de compétences et de solutions techniques pour y répondre. Dès la conception de nos drones, nous avons intégré des possibilités de reconfiguration. L’USV est modulaire, on peut réinjecter de nouvelles technologies et de nouvelles générations pour le mettre à niveau et allonger sa durée de vie pour lui éviter de devenir obsolète. 

ADROHA

VIANNEY ROCHET

Associé développement commercial 

Comment vos drones ont-ils été intégrés à l’exercice Dragoon Fury ? 

VIANNEY ROCHET : Nos drones ont été utilisés pour des missions d’interception, l’objectif était de neutraliser les menaces dirigées contre le bateau. Les drones n’étaient pas équipés de charges réelles, nous avons embarqué sur nos vecteurs des charges fictives visant à montrer la capacité à emporter et diriger ces charges contre des cibles. 

Un moment marquant de l’exercice ? 

V. R. : Embarquer aux côtés des marins nous a permis d’en apprendre plus sur l’environnement opérationnel. Cette proximité est très précieuse pour se rendre compte de certaines contraintes et ainsi faire évoluer nos développements. Déployer un drone depuis un bateau, potentiellement dans un environnement dégradé avec du stress et des conditions climatiques difficiles, engendre des contraintes techniques, logistiques et des aspects de sécurité à ne pas négliger. La bonne compréhension de ces éléments permet d’optimiser le drone et faciliter la vie des marins. 

Quelle est votre position face à la profusion de drones sur le marché international ? 

V. R. : Le théâtre d'opération ukrainien nourrit beaucoup notre expérience sur l’utilisation des drones et suscite de nombreuses idées. Il faut s’inspirer mais aussi prendre du recul pour s’adapter aux besoins spécifiques en France. La veille technologique est toujours une source d’inspiration, nous permet d'être à la page et d'offrir des solutions en adéquation avec les besoins de la Marine. Le sujet est en pleine effervescence, les salons regorgent d’innovations : il faut néanmoins savoir faire un tri intelligent et sélectionner les bonnes idées. L’évolution est très rapide mais parfois il faut laisser le temps à certaines technologies de murir 

Les industriels et la Marine © T. Golliot / MN

Les industriels et la Marine

Les industriels et la Marine

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