Portraits de champions
Ils sont treize. Treize sportifs de haut niveau, du judo à la voile, du kitesurf au canoë (ici, la céiste Eugénie Dorange, à Toulon avec l’équipage de la FREMM Alsace, le 18 juin dernier), représentant fièrement la Marine nationale à laquelle ils appartiennent.
Maître Charline Picon (49er FX)
La championne se réinvente
L’or à Rio, l’argent à Tokyo, les jeux de Paris sont riches de promesses pour Charline Picon. Enfant, elle commence la planche à voile en 1995 à la Tremblade où les odeurs d’iode se mêlent à celle des pins. Depuis, la véliplanchiste a (tout) raflé : un titre mondial en 2014, cinq titres européens entre 2013 et 2021 et deux podiums olympiques en 2016 et en 2021. Cet été, elle revient avec un nouveau défi : l’athlète change de discipline pour concourir dans la catégorie de dériveur 49er FX, où elle sera en binôme avec Sarah Steyaert. Pas question de se reposer sur ses lauriers, le challenge est de taille pour cette quatrième participation olympique !
Cols bleus : Participer aux Jeux Olympiques en France, dans votre pays, était-ce un rêve pour vous ?
Charline Picon : Vivre les jeux à la maison a fortement pesé dans la balance après Tokyo. Les jeux en France c’est une opportunité unique dans la carrière d’un athlète. Donc oui un rêve, et il fallait monter un projet pour pouvoir le vivre.
C. B. : Le 49er FX est une discipline en équipage, jusqu’ici votre sport était la planche à voile. Le fait d’être deux, représente- t-il un challenge supplémentaire ?
C. P. : C’est clairement le plus gros challenge : apprendre à communiquer, puis communiquer efficacement.
C. B. : Avez-vous eu l’impression d’apprendre un nouveau sport ?
C. P. : Oui complètement ! Le vent, les parcours restent identiques mais techniquement c’est un autre sport, même les noms des bouts sont différents.
C. B. : Depuis quand et comment vous préparez-vous pour ces JO ?
C. P. : En septembre 2021, j’ai contacté Sarah Steyaert pour voir si elle était d’accord pour sortir de sa retraite sportive et partir sur ce projet fou. Après un premier test on a signé. Il a fallu d’abord apprendre la technique de ce bateau très exigeant par son instabilité puis apprendre à naviguer à deux et à communiquer. Il y a aussi toute la partie matelotage, la préparation physique et la préparation mentale.
C. B. : Quels sont les points forts de votre binôme ?
C. P. : L’expérience et la complémentarité.
C. B. : Quels sont vos liens avec la Marine nationale ?
C. P. : Je suis entrée dans l’armée de Champions en septembre 2013. Ça m’a permis d’être à plein temps dans ma préparation olympique et d’avancer sereinement. Les stages d’acculturation militaire nous sont proposés plusieurs fois par an, afin de créer une cohésion entre athlètes de différents sports, rencontrer le monde militaire, et créer des liens. Ça reste de sacrées expériences ces stages, on va s’en souvenir longtemps !
C. B. : Quel sera votre prochain défi après les JO ?
C. P. : Apprendre à naviguer sur un plus gros bateau ! Je pars en famille autour du Pacifique sur un catamaran. Encore une sortie de ma zone de confort car je n’ai jamais navigué sur un tel bateau, mais j’ai besoin d’un beau projet pour prendre une grande inspiration auprès de ma fille et mon conjoint. En rejoignant une association environnementale, je veux rendre ce projet utile et peut-être en produire un film.
À la barre Sarah Steyaert (à gauche) et à la manoeuvre des voiles Charline Picon (à droite).
Matelot Joan-Benjamin Gaba (Judo - 73kg)
« Déterminé, motivé et honoré »
Jeune recrue de l’armée de Champions, Joan-Benjamin Gaba est entré dans la Marine en octobre 2023. Pour canaliser son énergie débordante, ses parents l’inscrivent au judo à six ans. Déjà familier des terrains de football et de rugby, il se découvre une passion pour cet art martial japonais. Ses points forts sur le tatami ? Son physique, sa puissance, son cardio et sa capacité à attaquer aussi bien à droite qu’à gauche. Champion de France des moins de 73 kilos, il portera avec fierté son kimono bleu aux Jeux Olympiques de Paris 2024.
Cols bleus : Avez-vous conscience de votre chance de participer aux Jeux Olympiques en France, dans votre pays ?
Joan-Benjamin Gaba : Ça n’arrivera plus c’est certain. Les étoiles sont alignées, c’est assez improbable que ça tombe sur notre génération. On va essayer d’en profiter au maximum et de puiser dans la force que les Français nous enverront pour faire la meilleure performance possible.
C. B. : Comment se déroule une journée- type d’entraînement pour les Jeux Olympiques ?
J-B. G. : On s’entraîne tous les jours du lundi au vendredi et parfois le samedi. Le matin c’est préparation physique, on alterne entre séances de cardio et de musculation. L’après-midi c’est judo, on commence avec la technique et ensuite il y a entraînement, puis combats et confrontations. Je me confronte à des judokas de ma catégorie n’ayant pas été sélectionnés pour les JO, mais le niveau des athlètes français est bon, ce sont donc des partenaires de qualité.
C. B. : Trois mots pour décrire votre état d’esprit ?
J-B. G. : Déterminé, motivé et honoré.
C. B. : Pour ces Jeux Olympiques, quels sont vos objectifs de médaille ?
J-B. G. : C’est un sport de combat, donc on a tous une mentalité de conquérant, on veut tous gagner, c’est évident. Si on vise le bronze, c’est certain qu’on n’aura pas l’or, donc je vise la médaille d’or.
C. B. : Quel sera votre prochain défi après les JO ?
J-B. G. : Être champion du monde 2025.
Matelot Joan-Benjamin Gaba sur le tatamis
Quartier maître Axel Mazella (Kite Foil)
Entre ciel et mer
C’est une consécration pour les amateurs de kitesurf du monde entier. Cet été à Marseille, ce sport fait son entrée aux JOP. Pratiquée par une poignée de passionnés dans les années 90, cette discipline sportive s’est progressivement popularisée et professionnalisée. À l’image du kitesurf, ce qui était au départ un simple loisir pour Axel Mazella a bien vite mué en une soif de compétition. Âgé de 26 ans, le Toulonnais est aujourd’hui déterminé à marquer l’histoire de ce sport.
Cols bleus : Comment décririez-vous les sensations du kite foil?
Axel Mazella : Notre planche est à un mètre au-dessus de l’eau grâce à l’aileron attaché en dessous. On a vraiment la sensation de voler, d’être en apesanteur.
C. B. : Comment avez-vous été sélectionné pour les JOP ?
A. M. : Nous avons été sélectionnés par la Fédération française de voile qui s’est basée sur nos performances de la saison dernière. J’ai été le Français le mieux classé sur les quatre épreuves internationales, dont les championnats d’Europe où je suis arrivé premier.
C. B. : Comment appréhendez-vous les JO ?
A. M. : Je prends les choses étape par étape. Aujourd’hui je ne pense pas aux JO mais à ma préparation physique.
C. B. : Qu’avez-vous ressenti en portant la flamme à Toulon ?
A. M. : Beaucoup d’émotion, car il s’agit de ma ville natale et tous mes proches étaient présents. De nombreuses personnes m’ont aussi encouragé, pris des photos voire ont couru à mes côtés sur les 200 mètres de mon tronçon. C’était très beau, qu’une simple flamme provoque autant d’émulation.
Axel Mazella kitesurfer dans sa discipline
Quartier-maître Hélène Noesmoen (planche à voile IQFoil)
Une aventure familiale
La planche à voile était un jeu. Quand Hélène Noesmoen a débuté, elle s’amusait sur l’eau avec ses frères et sœurs. Aujourd’hui, championne du monde (2020) et triple championne d’Europe en IQFoil, la sportive est toujours accompagnée par son frère Pierre, devenu son entraîneur. Elle rejoint l’armée de Champions en 2021 et devient marraine du sous-marin nucléaire lanceur d’engins Le Triomphant. Cette intégration dans la Marine et le soutien du CNSD lui ont permis de mettre son travail d’ingénieur sur pause afin de se concentrer sur l’IQFoil.
Cols bleus : Comment avez-vous vécu le passage de planche à voile à l’IQFoil ?
Hélène Noesmoen : Au début, j’ai dû tout réapprendre, me remettre dans la peau d’un débutant. Je trouvais ça génial, car dans le sport de haut niveau, on est vraiment appliqué tous les jours à s’entraîner et progresser sur des détails. Avec le passage au foil, la marge de progression est devenue énorme. Seul le foil est en contact avec l’eau, il y a un équilibre plus fin à trouver, au début on commet beaucoup d’erreurs d’appui, ce qui provoque de grosses chutes.
C. B. : Qui sont vos partenaires d’entraînement pour la préparation des Jeux ?
H. N. : Je suis dans un sport individuel mais autour de moi, j’ai une équipe super soudée, c’est une préparation collective. Les partenaires d’entraînement sont comme des concurrents d’entraînement et permettent d’élever le niveau de jeu. Ceux n’ayant pas été sélectionnés pour les Jeux ont accepté de m’aider à repousser mes limites et à élever mon niveau pour être prête. Eux aussi sont là pour ramener la médaille à la France car la voile est un sport de partage.
C. B. : Quels sont vos points forts pour ces Jeux ?
H. N. : La capacité d’adaptation est ma plus grande force. À Marseille, c’est encore plus vrai parce qu’en Méditerranée la météo évolue très vite avec de petits effets de vent liés à la chaleur. L’été sur ce plan d’eau, d’une heure à l’autre ça peut changer beaucoup, la clef sera de s’adapter.
Hélène Noesmoen en planche à voile IQFOIL
Quartier-maître Nicolas Goyard
« J’ai grandi avec la mer »
À bord du catamaran familial, un petit garçon de deux ans embarque pour une transatlantique. 26 ans plus tard, Nicolas Goyard n’a rien oublié de son enfance sur l’eau. Désormais, c’est sur sa planche équipée d’un foil, qu’il survole la mer. Intéressé par tous les aspects de son sport, il développe des foils et dessine ses propres planches. L’entrée de l’IQFoil * comme nouveau format de planche à voile, lui permet de gagner sa place pour les Jeux Olympiques. Cet été, à Marseille, Nicolas Goyard compte bien décrocher une médaille (en plein vol) !
Cols bleus : Quand et où avez-vous commencé à pratiquer la voile ?
Nicolas Goyard : La voile me suit depuis très longtemps, j’ai grandi avec la mer, c’est mon élément. J’ai vécu sur le bateau de mes parents jusqu’à mes dix-huit ans. Depuis tout jeune, j’ai appris à sentir le vent, les vagues, à barrer le bateau, donc toutes les sensations je les avais déjà. En Nouvelle-Calédonie, j’ai commencé l’Optimist à six ans, et la planche à voile à neuf ans.
C. B. : Quelles sont les sensations éprouvées en planche à voile à foil ?
N. G. : La liberté est forte, avec la vitesse il y a de l’adrénaline, c’est un sport de glisse. Derrière, on a une sensation de contrôle qu’il faut garder, toujours sur le fil de rasoir, à pousser la chose au maximum malgré l’instabilité. Et la connexion avec la nature est juste magique, on vole au-dessus de l’eau, on a l’impression d’être sur un tapis volant.
C. B. : Quels sont vos points forts pour les JO ?
N. G. : L’expérience car le nombre d’heures passées sur le foil me donnent un avantage sensoriel, ma capacité d’autoanalyse, mon endurance musculaire, et enfin ma vitesse.
C. B. : Quels sont vos liens avec la Marine nationale ?
N. G. : C’est une fierté d’avoir rejoint l’armée de Champions en octobre 2021. Le statut de sportif de haut niveau est souvent bancal et cette structure nous apporte justement une vraie stabilité. Je suis le parrain du Suffren, j’ai pu visiter le sous-marin et rencontrer l’équipage. C’était une riche expérience avec de très beaux échanges entre marins.
* Sur ce support, la dérive est remplacée par un foil surélevant la planche hors de l’eau en vitesse de planage
Quartier-maître Nicolas Goyard
Second maître Shirine Boukli (Judo – 48kg)
« Petite mais déterminée »
Le judo est une histoire de famille. Sous les regards avisés de son père et de son oncle, tous deux anciens judokas, Shirine Boukli pratique ce sport de combat depuis l’âge de quatre ans. Elle a d’ailleurs débuté dans le club de son oncle dans le Gard. Ceinture noire à 15 ans, elle combat aujourd’hui dans la catégorie des moins de 48 kg. En 2021, elle participe aux Jeux de Tokyo mais la jeune femme est éliminée dès le premier tour. Trois ans plus tard, plus déterminée que jamais, elle arrive pour Paris 2024, avec en poche un double titre de championne d’Europe et celui de vice-championne du monde.
Cols bleus : Vous êtes la marraine du porte-hélicoptères amphibie Dixmude, qu’est-ce que cela représente ?
Shirine Boukli : Quand on m’a annoncé que j’étais marraine du Dixmude, j’avais du mal à y croire. Je suis Shirine, une judoka dans les – 48 kg et je deviens marraine d’un énorme navire de guerre ! Je suis très fière et j’espère rendre fier l’équipage le 27 juillet. Je devrais les rencontrer en septembre.
CB: Quels sont vos points forts ?
S. B. : Ma capacité à varier mon judo, mon expérience et ma détermination. J’ai beaucoup travaillé sur le ne-waza (le sol) et des choses plus précises pas toujours visibles, mais qui apportent des opportunités.
CB : Quelles sont les sensations éprouvées lors d’un combat ?
S. B. : C’est une montée d’adrénaline immédiate, et il faut s’adapter en permanence à son partenaire pour réussir à trouver l’ouverture pour une attaque.
CB : Quel appui vous apporte l’armée de Champions ?
S. B. : C’est un soutien depuis 2021 qui me garantit une stabilité financière. Le commandement est toujours à notre écoute dans les bons moments comme dans les plus difficiles. Avec les autres sportifs, on forme aussi une vrai « team de champions », on se soutient, on s’encourage.
Second maître Shirine Boukli sur le tatamis
Matelot Johanne Defay (surf)
La numéro 1 française
Historiquement, jamais une Française n’avait atteint ce classement mondial. La numéro 1 en France occupe la 2e place du podium international. Née au Puy-en-Velay en 1993, cette Réunionnaise d’adoption est la première surfeuse à intégrer l’armée de Champions. Marraine de la base navale de Port des Galets à la Réunion, elle peut compter sur le soutien très enthousiaste et créatif des marins* d’Outre-mer. Une chance de médaille très forte.
Cols bleus : Qu’ont de spécial ces Jeux ?
Matelot Johanne Defay : Je n’ai participé qu’aux Jeux de Tokyo, et il y avait le Covid, c’était un peu bizarre. Alors je mesure la chance que j’ai de vivre des JO dans mon pays : c’est incroyable !
C. B. : Qui sont vos principales concurrentes ?
J. D. : L’Américaine Caity Simmers, numéro 1 mondiale, et l’Australienne Molly Picklum, sur la troisième place du podium. En France, la deuxième qualifiée au JO est la Tahitienne Vahine Fierro. Sur le circuit pro, elle est en deuxième division ; en revanche aux JO, elle est une grande locale de la vague mythique de Teahupo’o où vont se dérouler les épreuves, elle sera clairement une des filles à battre !
C. B. : Quel spot vous plaît le plus ?
J. D. : Ça dépend des humeurs ! Il y a autant de vagues différentes que de jours, c’est ce qui rend cette pratique si spéciale. J’adore les longues droites puissantes comme JBay, en Afrique du Sud. J’ai commencé à 7 ans, et j’ai tout de suite accroché ! Même, en jouant dans les vagues à la nage ou en bodyboard.
C. B. : Comment vous entraînez-vous ?
J. D. : J’ai deux routines. à la Réunion, on essaye de faire un entraînement surf le matin, puis en fonction des conditions, en fin de journée je fais de la musculation, de la course à pied et du vélo pour l’endurance fondamentale, du yoga pour le flow, des étirements, du skate. Je fais deux entraînements par jour voire trois. Avec mon mari qui est aussi mon préparateur physique, on travaille beaucoup le mental et le physique de front car c’est indissociable. En compétition, ou en déplacement - 8 à 9 mois par an – je m’adapte mais toujours avec beaucoup de surf au programme.
C. B. : Connaissez-vous les autres sportifs de l’armée de Champions ?
J. D. : Oui bien sûr, c’est aussi pour cela que j’adore en faire partie. Je rencontre d’autres sportifs, d’autres carrières, d’autres chemins de vie, et c’est très inspirant en tant qu’athlète.
Johanne Defay surfeuse
Second maître Jean-Baptiste Bernaz (Voile ILCA 7)
Réaliser un rêve d’enfant
De Pékin à Tokyo, en passant par Londres et Rio, Jean-Baptiste Bernaz est un vétéran des Jeux Olympiques. Médaille d’or à la Coupe du monde de voile 2017 et champion du monde d’ILCA7, le Provençal de 36 ans est parrain du Pôle École Méditerranée et se prépare désormais pour les JOP.
Cols bleus : Qu’est-ce qui vous a poussé à faire de la voile en compétition ?
Jean-Baptiste Bernaz : J’étais avec mon père chez David Ginola qui nous avait invités pour regarder la Coupe de l’America. Cela m’a immédiatement fait rêver, je devais avoir 8 ans ! Je me suis tourné vers mon père et je lui ai demandé comment embarquer sur ce type de voilier. Sa réponse a été simple : « À bord de ces bateaux-là, il y a plein de champions du monde ou de médaillés olympiques en Laser* donc si tu veux prendre part à ces courses, deviens l’un d’entre eux ». Ça a été le déclic pour moi.
C. B. : Où se déroulera l’épreuve olympique ?
J.-B. B. : Dans la rade sud de Marseille. Pour ma catégorie, l’ILCA 7, les courses auront lieu deux fois par jour du 1er au 5 août. À l’issue de ces dernières, les 10 premiers du classement général seront qualifiés pour la Medal Race qui se tiendra le 6 août devant la Marina olympique du Roucas-Blanc. Les points de cette ultime course compteront double donc il faudra certainement performer pour remporter une médaille.
C. B. : Comment appréhendez-vous cette édition des JO en France ?
J.-B. B. : Avec beaucoup d’envie et de motivation, grâce à toute l’énergie glanée auprès de ma famille et de mes amis. Ce seront peut-être mes derniers JO donc je ne veux rien regretter jusqu’à la fin.
* Ancien nom de l’ILCA7 jusqu’en 2021
Jean-Baptiste Bernaz évolue en voile ILCA 7
Second maître Marc-Antoine Olivier (Nage en eau libre)
Une belle entrée en Seine
Premier nageur de l’armée de Champions à avoir rejoint la Marine, Marc-Antoine Olivier plongera, cet été, dans les eaux de la Seine pour une course de dix kilomètres. À vingt ans, le nageur en eau libre remportait la médaille de bronze aux Jeux de Rio. Huit ans plus tard, il est vice-champion du monde. Cette fois, les Jeux sont à domicile. Marc-Antoine Olivier espère monter sur la plus haute marche du podium.
Cols bleus : Comment vous entraînez-vous pour les Jeux Olympiques ?
Marc-Antoine Olivier : Je m’entraîne à Ostia en Italie depuis les Jeux de Tokyo. Chaque semaine, on fait huit entraînements en bassin et deux en mer. Je suis dans un groupe avec quatre de mes plus gros concurrents. Ce n’est pas évident au quotidien parce que ça demande de l’exigence tous les jours, mais pour notre discipline c’est important. J’ai aussi pas mal de compétitions jusqu’aux Jeux, qui me permettent de gagner en expérience pour la course de cet été.
C. B. : Pour la nage en eau libre, plutôt eau douce ou eau salée ?
M.-A. O. : J’aime bien la mer, avec le sel on est porté, c’est plus facile, sauf quand la mer est très agitée. Une mer sans vagues, c’est idéal.
C. B. : La qualité de l’eau de la Seine a fait couler beaucoup d’encre, qu’en pensez-vous ?
M.-A. O. : Ce sont mes troisièmes Jeux, à chaque fois la qualité de l’eau est remise en question. Il n’y a jamais eu de problèmes, les organisateurs ont toujours su répondre présents. J’ai déjà fait des coupes du monde en Amérique du Sud, où les eaux étaient bien pires que celle de la Seine.
C. B. : Quel est votre meilleur souvenir avec la Marine ?
M.-A. O. : Les championnats de France militaires en 2018, il y avait une ambiance incroyable et j’ai pu découvrir un univers que nous, athlètes de haut niveau, n’avons pas l’habitude de côtoyer. J’ai pu rencontrer des marins du Charles de Gaulle qui repartaient en mission juste après, c’était vraiment sympa de discuter avec tout le monde.
Marc-Antoine Oliver nage en eau libre
Matelot Eugénie Dorange (Canoë)
Un sourire à toutes épreuves
Après la danse, l’équitation, le ski, Eugénie Dorange souhaite faire de l’aviron comme ses cousins. À Auxerre, pas d’aviron, mais avec sa sœur, elle débute le kayak à 8 ans puis le canoë trois ans plus tard, sport asymétrique et exigeant. Qualifiée pour ses premiers Jeux à 25 ans, elle s’entraîne plus de quinze fois par semaine sur l’eau, ce qui ne l’empêche pas de se préparer à passer le concours du barreau en septembre. Elle a rejoint l’armée de Champions en 2023 et devient marraine de la frégate Alsace.
Cols bleus : Pourquoi avez-vous fait cette bascule du kayak vers le canoë ?
Eugénie Dorange : Avant les femmes n’avaient pas le droit de faire du canoë car soi-disant cela déformait le bassin. La première compétition internationale date de 2009 aux championnats du monde et le canoë féminin intègre les Jeux seulement à Tokyo, en 2021. En club, j’ai eu la chance de rencontrer les premières Françaises sélectionnées en « canoë dames ». Cela m’a montré que des filles pouvaient aussi pratiquer cette discipline.
C. B. : Vous attendiez-vous à être sélectionnée ?
E. D. : Sur le papier, ça fait quelques années que je suis la meilleure française, et il fallait assurer cette année encore pour être qualifiée. C’était un objectif dans mes cordes, mais une sélection olympique n’est jamais gagnée d’avance et implique énormément de stress. Aujourd’hui, je suis qualifiée en monoplace mais j’ai une petite déception de ne pas m’être qualifiée en biplace parce que c’était notre objectif avec mon équipière.
C. B. : Dans quel état d’esprit êtes-vous à l’approche de cette compétition ?
E. D. : La distance est différente entre le biplace et le monoplace. Toute l’année, je me suis préparée sur du 500 mètres, en équipage. Là, la préparation change car je vais courir 200 mètres en monoplace. Tous les jours comptent, chaque séance, chaque coup de pagaie doit être optimisé pour progresser et être performante aux Jeux. Mon objectif est de faire descendre mon chrono au maximum pour être compétitive. Une fois au Jeux, tout est possible.
Matelot Eugénie Dorange évolue en canoë
Quartier-maître Jérémie Mion (Voile 470)
Se défier au quotidien
De la voile en Île-de-France. Ce n’est pas courant, pourtant, c’est à Cergy-Pontoise, à l’âge de 11 ans que Jérémie Mion a découvert cette discipline. Champion du monde en 2018, trois fois champion d’Europe, troisième de la transat Jacques Vabre en 2021, cet éternel optimiste aime la connexion avec la nature, la mer, le vent, ce sentiment d’évasion. Aux Jeux de Paris 2024, il concourt en 470 au côté de Camille Lecointre.
Cols bleus : Quelle est la spécificité du 470 ?
Jérémie Mion : Le 470 est un dériveur de 4m70 de long. Il y a trois voiles : une grand-voile, un foc et un spinnaker. Jusqu’à présent, les équipes n’étaient pas mixtes, donc j’ai déjà fait les jeux de Rio et Tokyo avec Sofiane Bouvet et Kévin Peponnet. Depuis cette olympiade, c’est devenu mixte donc on s’est associé avec Camille il y a presque deux ans. Je suis équipier et Camille est barreuse.
C. B. : Quel sera votre objectif ?
J. M. : On vise l’or, comme cela si ça foire on aura le podium (rires). Je pense qu’on peut oser rêver de la médaille d’or mais on est lucide. Ce sport est soumis à la météo, ce n’est pas simple. Si on fait un podium on sera quand même très content. Avec Camille, on a décidé d’aller vite mais on a tous les deux une grosse expérience.
C. B. : Et votre prochain défi ?
J. M. : Retenter une olympiade si j’ai encore de l’énergie. Sur le court terme, j’ai dans l’idée de changer de support et de partir en 49er * avec Jean-Baptiste Bernaz et sur du long terme, j’aimerais retenter les courses au large.
C. B. : Pourquoi l’armée de Champions ?
J. M. : La voile est un sport peu médiatisé à l’origine. Ce n’est pas simple de vivre de notre sport. Être dans l’armée de Champions me permet de me concentrer sur mon sport avec une solde tous les mois. Nous partageons aussi des valeurs communes entre sportifs de haut niveau et marins : l’entraide, la persévérance, l’humilité. J’ai l’impression d’être rentré dans une grande famille qui nous épaule et compte sur nous.
* Classe de dériveur à deux équipiers de 4,99 mètres de long.
Quartier-mâitre Jérémie Mion en voile 470
Second maître Hugo Boucheron (Aviron)
Force et endurance
Champion du monde (2016), champion d’Europe (2018) champion de France (2020) et champion olympique (2021). Hugo Boucheron peut s’enorgueillir d’un palmarès exceptionnel. Entré dans l’armée de Champions en 2018, ce rameur a d’abord pratiqué seul avant de ramer en duo puis à quatre et huit. Avec son coéquipier Matthieu Androdias, ils souhaitent décrocher la victoire devant leurs proches et faire résonner la Marseillaise sur les podiums.
Cols bleus : Quelles sont les sensations éprouvées lors d’une course ?
Hugo Boucheron : C’est une intense douleur (rires). L’aviron est un sport technique et physique. Le muscle est très sollicité avec une forte présence de lactates qui amènent une douleur dans l’effort. C’est vraiment un épuisement total et en même temps, il faut réussir à gérer son corps techniquement. Pour autant, on va chercher le plaisir dans la réussite de son geste pour aller au bout de l’effort avec son coéquipier et surtout passer la ligne en premier.
C. B. : Pour quelles raisons vous êtes- vous tourné vers le « deux de couple » ?
H. B. : Lors de sélections nationales individuelles aux championnats de France, nous nous sommes démarqués avec mon coéquipier, Matthieu Androdias. Le club a décidé de nous faire évoluer ensemble et notre duo a bien fonctionné. Depuis 2015, nous continuons en équipe.
C. B. : Comment avez-vous rejoint l’armée de Champions ?
H. B. : Je suis arrivé en équipe de France élite chez les seniors, en 2014. Je n’avais pas de sponsors et d’argent, donc j’étais entraîneur dans mon club à mi-temps et je m’entraînais en parallèle. Pour être capable de rivaliser contre la concurrence et les exigences internationales, il faut avoir beaucoup de temps pour pratiquer (en moyenne trois fois par jour). Je devais augmenter le rythme d’entraînement et de récupération. J’ai rejoint l’armée de Champions en 2018, et elle m’accompagne pleinement dans mon projet olympique. Et les résultats sont là ! J’ai remporté plusieurs titres internationaux. Un sportif doit pouvoir se concentrer à 100 % sur son sport et la Marine me permet de pouvoir faire cela toute l’année.
Second maître Hugo Boucheron évolue en aviron
Matelot Emma Lombardi (Triathlon)
Trois sports en un
Elle n’a que 22 ans, mais nourrit déjà des ambitions de titre olympique. Membre de l’équipe féminine de triathlon, le matelot Emma est la plus jeune sportive de la Marine nationale à avoir été sélectionnée. Elle est aussi la marraine de la frégate de défense aérienne (FDA) Chevalier Paul.
Le sport a toujours fait partie de son quotidien, grâce à ses parents qui l’inscrivaient, elle et son frère, à une association sportive chaque année. Emma Lombardi a ainsi commencé la natation à l’âge de cinq ans avant de découvrir le triathlon quatre ans plus tard. Ce sport a la particularité de combiner la natation, le cyclisme et la course à pied. Encore lycéenne, elle se lance dans la compétition et connaît une ascension fulgurante. Championne du monde espoir en 2021 puis championne du monde en relais mixte l’année suivante, la triathlète iséroise est classée numéro 3 mondial en 2023. Elle-même ne s’y attendait pas : « Cela a été une surprise pour moi, j’avais pour objectif de courir avec les plus grandes, mais je ne pensais pas faire de telles performances ! Mais je pense que je dois encore travailler ma vitesse et mon explosivité. » *
Grâce à ses performances, elle fait partie des trois triathlètes féminines à avoir été sélectionnées pour représenter la France, cet été aux JOP. L’épreuve olympique aura lieu le 31 juillet et sera divisée en trois tronçons. La course commencera par 1500 m de natation dans la Seine, suivie de 40 km de cyclisme répartis en sept tours et se conclura par 10 km de course à pied. Le pont Alexandre-III sera le point de départ et la ligne d’arrivée. L’athlète participera aussi à la course en relais mixte prévue le 5 août.
* Source : Centre de ressources, d’expertise et de performance sportive (CREPS) Provence-Alpes-Côte d’Azur, ministère des Sports.
Matelot Emma Lombardi en triathlon
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