Diplomatie de défense : rencontre avec le colonel Pierre P., attaché de défense français en Roumanie.
La DGRIS assure la tutelle du réseau bilatéral diplomatique de défense, qui comprend aujourd’hui 93 missions près les ambassades de France à l’étranger. Le colonel Pierre P., attaché de défense près l’ambassade de France en Roumanie nous éclaire sur son travail d’attaché de défense au sein de la capitale roumaine, sur le flanc est de l’Europe.
1) La Roumanie en étant nation-cadre, quelle place prend la mission Aigle à la MDD Bucarest ?
La force Aigle et la mission de défense (MdD) occupent des fonctions bien distinctes. La première est une force opérationnelle déployée dans le cadre des plans de défense de l’OTAN, tandis que la mission de défense a pour rôle premier de représenter les autorités du ministère des Armées auprès des autorités roumaines. À ce titre la MdD permet d’entretenir le dialogue et la relation bilatérale de défense avec la Roumanie.
Toutefois, la présence de 1 500 soldats en Roumanie a un impact fort dans la relation de défense que nous entretenons avec nos partenaires roumains, outre l’appui à la force Aigle. La MdD est ainsi l’interface indispensable de ce déploiement avec toutes les autorités ministérielles et interministérielles civiles.
Un exemple concret de cette coopération : le projet de rénovation d’un pont devant être employé par nos forces est porté au niveau du gouvernement par le biais de l’ambassade et non de la seule force Aigle.
Nous exploitons donc, à leur maximum, les opportunités de coopération locale induites par la présence de la force Aigle. Nous cherchons à capitaliser sur son action pour illustrer la politique de défense de la France dans cette région. La MdD joue notamment un rôle clef dans les visites officielles et les rencontres bilatérales de haut niveau, le montage et la participation à d’évènements tels que des forums et conférences ou les fêtes officielles roumaines.
Concrètement, au quotidien, nous travaillons en très étroite collaboration entre la force Aigle, la MdD et la chancellerie de l’ambassade afin de faciliter le dialogue avec nos partenaires. Il est, en effet, fondamental que nos messages et nos actions soient parfaitement coordonnés afin de garantir une complète cohérence vis-à-vis de nos partenaires. Nous participons ainsi, ensemble, MdD et force Aigle, à des réunions régulières de travail avec le ministère roumain de la Défense.
Nous nous rencontrons également en interne « équipe France », réunissant les différents acteurs de la politique de défense française dans une logique interservices et interministérielle. C’est un travail récurrent, exigeant et qui demande beaucoup d’énergie et de ressources, mais nous en observons réellement les effets bénéfiques.
2) Comment s'articule la coopération opérationnelle et capacitaire franco-roumaine ?
La première revêt de multiples facettes, puisqu’elle s’appuie tant sur la force Aigle que sur les armées dans un cadre purement bilatéral.
Avant même d’aborder la relation avec nos amis roumains, il faut souligner que, dans le cadre de l’OTAN, à Cincu notamment, nos soldats s’entraînent conjointement avec des partenaires européens. En premier lieu avec nos partenaires belges, luxembourgeois et désormais espagnols, avec qui nous formons le bataillon multinational, dont la France est nation-cadre. C’est d’ailleurs au sein de cette entité que s’effectue le premier travail d’intégration interallié et, force est de constater, que cela se déroule très bien. Nous constatons une excellente synergie avec nos voisins, dont la capacité de combat est quotidiennement démontrée par les exercices réalisés. C’est un vrai succès, que l’on oublie trop souvent.
La coopération avec l’armée roumaine, ainsi que d’autres partenaires déployés, comprend plusieurs niveaux :
- Les forces déployées sous mandat OTAN (composante terrestre à Cincu et système antiaérien Mamba de l’armée de l’air et de l’espace à Capu Midia).
- Les forces françaises venant temporairement effectuer des exercices et entraînement en partenariat. Pour ces derniers, il s’agit notamment de petits déploiements réguliers d’avions de combat ou de patrouilles maritimes allant de quelques jours à plusieurs semaines. Ils permettent de s’approprier les conditions d’exécution et de mieux connaître nos alliés locaux, leurs habitudes de travail. C’est essentiel pour garantir l’efficacité de nos armées en cas d’opérations réelles dans la région car nous devrons alors nous appuyer sur eux.
S’agissant de la coopération capacitaire, le France et la Roumanie ont plusieurs projets en gestation. Le principal et le plus immédiat porte sur l’acquisition, par la Roumanie, d’un nombre important de systèmes de défense sol-air portables Mistral 3. Pour ce faire, la France propose une formule novatrice consistant à agréger les besoins des armées françaises avec d’autres pays partenaires, dont la Roumanie, pour passer des contrats avec l’industriel via la direction générale de l’armement (DGA). Cela permet de simplifier grandement le processus d’acquisition pour eux et de garantir un effet d’échelle sur le prix au regard du nombre total de systèmes commandés. Nous attendons actuellement que se concrétise cette offre. Par ailleurs, des entreprises françaises sont également en lice pour la fourniture de système de défense antiaérien et d’hélicoptères.
3) Quels sont les enjeux spécifiques à la MDD Bucarest ou les sujets forts ?
En arrivant à Bucarest, alors que j’avais déjà eu une expérience préalable dans une autre ambassade, j’ai fait le compte des différents domaines que revêtait notre activité. Je me suis rapidement aperçu que mon périmètre de travail inclut tous les domaines qu’un attaché de défense peut avoir, et ce avec un volume conséquent : opérations militaires, coopération entre armées, devoir de mémoire, coopération capacitaire, exercices, déploiements, politique de défense, dossiers OTAN et UE… bien sûr les opérations revêtent un caractère prioritaire, mais tous les domaines sont importants et à ne pas négliger. J’ai la chance de bien connaître la Roumanie depuis plusieurs décennies, de parler roumain et d’avoir tenu un poste similaire il y a quelques années dans un autre pays. Ce sont des atouts extrêmement précieux qui me permettent aujourd’hui de travailler de manière beaucoup plus efficace. Au sein de la MdD, il y a également une équipe très soudée, ce qui est essentiel pour mener à bien toutes les missions.
In fine, malgré l’éloignement géographique et une histoire différente, tous les éléments sont rassemblés pour que la relation bilatérale avec nos amis roumains se développe dans les meilleures conditions. Je constate que nos intérêts et notre approche se rejoignent très souvent et qu’il y a un intérêt mutuel à renforcer les liens après des dizaines d’années de plus faible priorité. Je suis heureux de pouvoir apporter ma pierre à la construction d’une relation solide et durable au sein d’une Europe fraternelle.
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