Diplomatie de défense : rencontre avec le colonel Valery S., attaché de défense français en Albanie.
La DGRIS assure la tutelle du réseau bilatéral diplomatique de défense, qui comprend aujourd’hui 93 missions près les ambassades de France à l’étranger. Le colonel Valery S., attaché de défense près l’ambassade de France à Tirana nous éclaire sur son travail d’attaché de défense au sein de la capitale Albanaise, sur le flanc est de l’Europe.
Quelle part la diplomatie occupe-t-elle dans votre métier ?
Si on prend la question sous l’angle le plus large, on peut d’abord rappeler que l’attaché de défense est, par nature, un diplomate.
L’article 6 du décret du 31 décembre 1992 relatif à l’organisation de la représentation du ministre de la Défense au sein des missions diplomatiques le définit ainsi : « L'attaché de défense et les attachés de défense adjoints font partie du personnel diplomatique de la mission au sens de la convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques et jouissent à ce titre des privilèges et immunités diplomatiques prévus par ladite convention ».
Et c’est bien de cette manière qu’il est perçu formellement par son État accréditaire, c’est-à-dire le pays hôte, son ministère de la Défense et la communauté diplomatico-militaire au sein de laquelle il évolue.
Dans ce cadre, un certain nombre de taches régulières de la mission de défense relèvent de la diplomatie : gestion des survol et escales, conduite d’entretiens politico-militaires, accompagnement d’autorités à des salons d’armement ou encore des actions de rayonnement. Ces tâches diplomatiques s’équilibrent avec celles plus techniques et militaires liées à mon quotidien : veille de la presse et de l’environnement de défense, analyse documentaire, rédaction de points de situation, contribution à des commandes de l’administration centrale…
« Il est observable, pour l'ensemble des pays dans lesquels j'exerce mes fonctions, que [la guerre en Ukraine] est perçu[e] comme ayant des effets indirects sur la stabilité régionale en raison de la multiplication des menaces hybrides, notamment dans le champ informationnel. »
Quels sont les enjeux propres à la mission de défense (MDD) Tirana ?
La réouverture de la MDD de Tirana en 2019 est concomitante au lancement de la stratégie pour les Balkans occidentaux. Elle a offert un nouveau cadre pour l’intensification de nos échanges avec l’Albanie et les États limitrophes. La particularité de la MDD Tirana est qu’elle assure également le suivi de la relation de défense bilatérale avec le Kosovo, la Macédoine du Nord et le Monténégro.
Cette intensification des échanges s’est traduite par :
- L’organisation de dialogues stratégiques ;
- La participation de représentants de ces pays aux sessions internationales Balkans et sessions internationales « armement et économie de défense de l’IHEDN » ;
- La signature d’Accords intergouvernementaux ;
- Des réunions d’état-major ;
- Des entretiens du ministre des Armées avec ses homologues, dont les plus récents remontent au dernier salon Euronaval, en novembre 2024.
Si la coopération opérationnelle avec ces 4 pays reste limitée, il est important d’entretenir la relation pour ne pas laisser le champ totalement libre à nos compétiteurs. L’entretien de cette relation avec nos partenaires permet aussi d’affirmer notre solidarité et notre soutien sur des secteurs ciblés comme la modernisation et la montée en gamme des forces armées locales dans le cadre de leur appartenance à l’OTAN.
Il en va de même en matière d’armement, où notre position est également fortement concurrencée. Nous avons toutefois pu nous imposer en Macédoine du Nord (Mistral) et au Monténégro (patrouilleurs Kership). En revanche, l’Albanie demeure un territoire de reconquête après les succès des années 2000 (Cougar, notamment) et 2010 (canons navals). La conjoncture semble néanmoins favorable à une reprise dans ce domaine avec ce pays.
Quelles sont les spécificités des MDD situées dans les Balkans ? La guerre en Ukraine a-t-elle des conséquences dans votre quotidien ?
Me concernant, on peut noter que le rassemblement de mes quatre pays sous la dénomination unificatrice de « Balkans occidentaux » ne rend pas totalement compte de la diversité des situations locales :
- Trois monnaies (Lek, Denar macédonien et Euros) ;
- Trois langues principales (albanais, macédonien, monténégrin) ;
- Deux pays ont une façade maritime, et les deux autres étant rigoureusement enclavés ;
- Une Albanie se considérant davantage comme un pays méditerranéen que comme un pays Balkanique.
La guerre en Ukraine n’a pas de conséquences directes dans mon quotidien. Mes pays d’accréditation contribuent, à leur échelle, à travers la formation de soldats ukrainiens, en particulier dans le cadre des missions :
- Interflex (opération britannique) ;
- NSATU (NATO Security Assistance and Training for Ukraine).
Ainsi, en 2023, l’Albanie a contribué à la formation d’une compagnie ukrainienne sur sa base de Biza, tandis que la Macédoine du Nord a formé une compagnie dans son camp national de Krivolak.
Il est observable, pour l’ensemble des pays dans lesquels j’exerce mes fonctions, que ce conflit est perçu comme ayant des effets indirects sur la stabilité régionale en raison de la multiplication des menaces hybrides, notamment dans le champ informationnel.
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