Opération Dragoon en Provence, la liberté vient de la mer
Le débarquement de Provence fut avant tout une volonté française. Churchill était opposé à cette opération car il considérait qu’il fallait continuer en Italie ou dans les Balkans. De Gaulle a réussi à l’imposer pour des raisons de politique intérieure et de restauration de la souveraineté française.
A l’aube du 15 août, trois divisions américaines commandées par le général Patch, suivies le lendemain par les trois divisions françaises du général de Lattre de Tassigny, sont débarquées entre Hyères et Cannes. Elles sont appuyées sur les arrières de l’ennemi par le parachutage d’une division anglo-américaine, et sont précédées par des raids commandos nocturnes. Il s’agit de prendre pied en Provence pour remonter par la vallée du Rhône, ce qui permettra d’opérer la jonction avec les forces débarquées en Normandie, et à terme de couper l’Allemagne des ports atlantiques. La participation française à Dragoon est considérablement plus importante que pour Overlord : à terre, il y a quasi-parité avec les Américains, avec la 1re armée française qui comprend notamment le 1er régiment de fusiliers marins. Deux des trois forces commandos sont françaises, dont le groupe d’assaut naval de Marine Corse du commandant Seriot. Sur mer, on compte 34 navires de guerre français, presque le triple de ce qui était présent pour Overlord, dont le cuirassé Lorraine et six croiseurs qui assurent l’appui-feu.
Victoire éclair en Provence
En supériorité numérique et matérielle, les Alliés progressent beaucoup plus vite que prévu. Le 19 août, les Allemands se replient vers la vallée du Rhône, à l’exception des places de Marseille et Toulon qui ont ordre de tenir jusqu’au bout. Ces dernières se rendent le 28 aux troupes françaises, alors que les Anglo-Américains atteignent les rives du Rhône et les Alpes-de-Haute-Provence. L’opération Dragoon, planifiée sur deux mois, a atteint ses objectifs en deux semaines. Mieux encore, la nouvelle du repli allemand a été un des éléments déclencheurs de l’insurrection parisienne du 19 août. Le 12 septembre, les forces alliées débarquées en Provence et en Normandie effectuent leur jonction à Nod-sur-Seine, en Côte-d’Or.
Une unité retrouvée dans le combat
Pour la Marine nationale, le débarquement de Provence fait acte de réunification entre les éléments séparés voire dressés les uns contre les autres par la défaite de 1940 : FNFL de Grande-Bretagne ou ralliés depuis l’empire colonial, ceux de la force X internés à Alexandrie, la marine d’Afrique du Nord sous contrôle de Vichy jusqu’en 1942, et même les marins engagés dans les forces françaises de l’intérieur. Ayant pris, volontairement ou contre leur gré, des chemins différents quatre ans plus tôt, ils se trouvent maintenant réunis en force sur les côtes varoises pour reconquérir le sol métropolitain, notamment Toulon, d’importance tant stratégique que sentimentale pour la Marine.
Le débarquement oublié
Pendant longtemps, c’est le débarquement de Provence et non de Normandie qui s’est trouvé au centre du discours mémoriel, en raison d’une participation française plus marquée. Pour le vingtième anniversaire, en 1964, le général de Gaulle privilégie ainsi l’inauguration du mémorial du Mont-Faron et ne se rend pas sur les plages de Normandie. Mais bien vite, Overlord prend le dessus dans la mémoire publique, que ce soit dans la culture populaire, l’enseignement scolaire et même les hommages nationaux. Lié directement à la libération de la capitale, fortement valorisé à l’international par le cinéma américain à partir des années 1960, le débarquement de Normandie a aussi, dans le contexte de la Guerre froide, l’avantage sur celui de Provence d’impliquer de nombreux pays désormais membres de l’alliance atlantique et de la communauté européenne. Néanmoins, la mémoire du débarquement de Provence reste vive localement. Elle est redynamisée sur le plan national à partir du cinquantenaire en 1994, notamment sous l’angle des combattants africains de la 1re armée.
13 septembre 1944, arrivée de l'escadre française à Toulon sous les ordres de l'amiral Lemonnier à bord du croiseur Georges Leygues
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