Stratégie « Climat & Défense » : quel bilan après 6 mois de mise en œuvre ?
Pour se préparer aux changements climatiques, le ministère des Armées s’est doté au printemps d’une stratégie « climat & défense ». À l’occasion de la Journée mondiale du climat, Nicolas Regaud, conseiller climat du major général des armées, dresse le premier bilan de sa mise en œuvre.
Vous avez pris votre fonction de conseiller climat au printemps. Depuis l’adoption de la stratégie, qu’en est-il de sa mise en œuvre ?
Nicolas Regaud, conseiller climat du major général des armées : En octobre, le nouveau comité ministériel « climat et défense », présidé par le major général des armées, délégué climat du ministère, a validé un plan d’orientation et d’actions à conduire à l’horizon de la fin 2024. Au-delà des tâches de coordination et de synthèse confiées au Secrétariat permanent que je dirige, ce plan a mis en place cinq ateliers thématiques. Leur objectif est de coordonner la réflexion et l’action des nombreux acteurs du ministère, et, pour certains d’entre eux, de préparer une feuille de route précise. Chacune comportera des orientations et des mesures échelonnées dans le temps qui constitueront l’armature de la phase 2 du plan d’action.
« Nous avons commencé par élaborer une stratégie « Climat Défense » très large. Désormais, il faut qu’elle soit intégrée dans les divers processus internes qui génèrent la transformation des armées. »
- Conseiller climat du major général des armées

Quels sont ces ateliers ?
Le premier porte sur l’impact du changement climatique sur le contexte géopolitique international et sur l’emploi des forces. Nous le voyons déjà, le changement climatique affecte très durement un grand nombre de pays au travers d’événements météorologiques extrêmes, des phénomènes de sécheresse ou de raréfaction de la ressource hydrique. Cela affecte la sécurité humaine, parfois les équilibres internes de certains pays vulnérables, et accroît les tensions internationales, notamment à propos du partage des ressources hydriques. La hausse des températures, les aléas extrêmes et la modification de l’environnement vont également conduire à adapter nos opérations, le soutien des forces ou la préparation opérationnelle. Il est nécessaire de cartographier ces modifications à venir de notre environnement international afin de préparer les armées et assurer leur résilience.
Le deuxième atelier étudie les conséquences du changement climatique sur les capacités des armées. En effet, les systèmes d’armes doivent tenir compte d’un environnement qui va devenir de plus en plus contraignant et abrasif. Les chaleurs extrêmes, le réchauffement et l’acidification des océans ou encore l’amplification des tempêtes de sable et de poussières peuvent affecter ces systèmes d’armes et ceux qui les servent. Il convient de préciser ces effets et de dégager des priorités d’action à conduire, en particulier en termes d’innovation.
Un troisième atelier porte sur la résilience des infrastructures aux multiples conséquences du changement climatique. C’est fondamental car la capacité des armées à remplir leurs contrats opérationnels en dépendent. La France dispose d’infrastructures militaires partout à travers le monde. Elles sont exposées à toute la palette des risques climatiques, ce qui nécessite de disposer d’une vision précise des risques présents et à venir : chaleurs extrêmes, submersions marines, glissements de terrain, crues torrentielles, incendies, etc. Cette cartographie des risques doit nous permettre d’élaborer un plan d’adaptation à moyen-long terme – priorisé – de nos infrastructures.
Deux autres ateliers se concentrent sur l’évolution de l’environnement normatif et sur la coopération internationale puisque les enjeux de sécurité climatique et de la transition énergétique sont désormais pris en compte au niveau européen, de l’Otan et dans un nombre croissant d’enceintes régionales.
Quelles sont les étapes de la mise en place de votre plan d’action ?
C’est une démarche en entonnoir. Nous avons commencé par élaborer une stratégie très large. Désormais, il faut qu’elle soit intégrée dans les divers processus internes qui génèrent la transformation des armées. Nous ne pouvons pas aller directement de l’idée à l’action. Cela demande un travail d’affinage et de planification. Des méthodes et des processus permettent de prioriser les travaux en matière d’adaptation des équipements ou des infrastructures par exemple.
Qu’en est-il de la coopération internationale ?
Aujourd’hui, nous devons davantage coordonner nos actions dans ce domaine. Cela couvre un champ très large, allant des questions liées à la transition énergétique à celles relevant de l’adaptation ou de la sécurité climatique. Les implications du changement climatique en matière de défense et de sécurité sont un sujet pris en compte par les membres de l’Union européenne et de l’Otan à tous les niveaux ; il nous faut donc en tirer des enseignements mais aussi partager nos connaissances et nos savoir-faire. Hors de ces deux enceintes, nous avons également lancé des initiatives internationales pour développer la coopération dans d’autres régions du monde, notamment en Indo-Pacifique. Il nous faut poursuivre et approfondir les échanges, élaborer de nouveaux projets et agir ensemble lorsque cela est possible.
Quels sont vos projets pour la suite ?
Une réflexion est en cours afin de disposer d’outils internes de sensibilisation, de communication et de formation sur les enjeux de défense du changement climatique. Nous avons également en vue de favoriser les travaux de réflexion sur cette thématique au sein des centres de recherche et de formation des armées. Tous les acteurs du ministère peuvent décliner, à un titre ou à un autre, cette stratégie.
Les armées face au changement climatique
Dans le quatrième numéro d’Esprit défense, vous saurez tout sur la manière dont les armées agissent face au changement climatique, aussi bien au niveau de leurs enjeux opérationnels, de la défense de l’environnement ou de la mise en oeuvre de la transition énergétique.
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