« Les derniers hommes » : David Oelhoffen, « plus que des militaires, j’ai filmé des hommes »

Direction : Ministère des Armées / Publié le : 19 février 2024

Après trois longs-métrages primés dans de nombreux festivals, David Oelhoffen a réalisé Les derniers hommes, au cinéma le 21 février. Produit par Jacques Perrin, ce film offre une immersion totale aux côtés de légionnaires. Le cinéaste nous dévoile les coulisses de ce projet « existentiel » et son rapport aux armées.

: David Oelhoffen, le réalisateur du film Les derniers hommes, lors de l’entretien. © Antoine Delaunay

Vous avez étroitement travaillé aux côtés de Jacques Perrin. Pouvez-vous nous parler de cette rencontre et de la genèse du film ?

David Oelhoffen : Jacques Perrin est à l’initiative du projet. L'Indochine l'a toujours fasciné. Il a d’ailleurs commencé sa carrière d'acteur en France avec La 317e Section. Ce film l'a durablement marqué. C’est aussi le cas du public militaire. En 2010, en réalisant L’empire du milieu du sud avec Eric Deroo, Jacques Perrin a trouvé une archive sur la colonne Alessandri : des soldats français épuisés fuyant vers la Chine après le coup de force de l’armée japonaise en 1945. Des images impressionnantes, sur une histoire trop peu connue. Il a décidé d'en faire un film. Il s'est lancé dans l'écriture avec des scénaristes. Puis il m'en a proposé la réalisation. Il a accepté que je ré-écrive en partie le scénario pour garder les éléments qui me plaisaient le plus : l'omniprésence de la nature, la dignité de ces hommes face à la mort et un regard sur l'époque coloniale.

Extrait du film Les derniers hommes, sorti au cinéma le 21 février 2024. © P.Chauvel, Galatée films

Afin de rendre votre film crédible, vous avez collaboré avec la Mission cinéma et industries créatives (MCIC) du ministère des Armées ainsi qu’avec le 3e régiment étranger d’infanterie (3e REI).

La crédibilité militaire était essentielle. Sans la MCIC et sans le 3e REI, nous n’aurions pas réussi. Grâce à eux, j’ai notamment rencontré Antonio Lopez. Cet ancien légionnaire a accepté d'être notre conseiller militaire. C’était un élément central. Son expérience de soldat a permis d'aider les comédiens : les positions, la marche, les dialogues, les émotions, le port de l’arme… C’était rassurant de disposer d’une personne ayant vécu une situation similaire à celle du film. Le charisme d'Antonio et son adaptation fulgurante m'ont ensuite convaincu de lui proposer un rôle. Les derniers hommes, c'est la peinture d'une colonne totalement abandonnée. L’armée est alors dans un état de décrépitude totale. C'était donc important de savoir où placer la limite afin que le film reste crédible.

Vous avez notamment suivi un stage au Centre d'entraînement en forêt équatoriale (CEFE), en Guyane.

Ce stage, c’est le moment où les comédiens se sont connus. Tout de suite, des affinités se sont créées. Au début, il y avait différents groupes, par nationalités. C’était très intéressant. Pour la majorité des acteurs, il s’agissait de leur première expérience en forêt. Ce stage a donc été très bénéfique. Cependant, nous n’avons pas réalisé le véritable stage commando. Mais ce qu’il se passe au CEFE reste au CEFE (rires).

Avec Loin des hommes et aujourd’hui Les derniers hommes, vous semblez disposer d’une appétence pour le milieu militaire. Quel est votre rapport à l’institution ?

Je n'avais qu’un lien affectif. Ma mère vient d'une famille composée de militaires. Je connais donc intimement ces personnes. Dans ce film, plus que des militaires, j'ai d’ailleurs essayé de filmer des hommes. Avec bienveillance et sans préjugé. Je ne vois pas des galons ou des uniformes, je vois des hommes à l'intérieur d’un uniforme. J’ai eu la chance d’effectuer mon service national au titre de la coopération et de partir 18 mois en Amérique du Sud. C’était extrêmement intéressant et intense. Cela m’a donné envie de voyager et de comprendre le monde. De plus, l’armée est consciente du pouvoir de l’image et du cinéma. Ces deux milieux partagent une histoire commune.

Recueilli par Margaux Bourgasser

Les derniers hommes, c’est quoi ?

9 mars 1945 : l’armée japonaise lance un assaut foudroyant contre les troupes françaises en Indochine. Traquée par l’ennemi, une colonne de légionnaires déjà affaiblis s’élance au cœur de la jungle pour rallier les bases alliées à plus de 300 km.

Grand entretien : David Oelhoffen, réalisateur du film Les derniers hommes

© Ministère des Armées

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