IA militaire : bâtir l’éco-système de demain

Direction : Ministère des Armées / Publié le : 11 février 2025

Dans le cadre du Sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle – Enjeux de Défense, qui s’est tenu lundi 10 février, le ministère des Armées a organisé plusieurs conférences dédiées à l'IA dans le domaine de la Défense. Ces échanges se sont déroulés à l'École militaire et ont réuni de nombreux experts. 

Conférence Sommet IA de défense : Demain, quels usages de l’IA militaire et comment s’y préparer ? © Tanguy Barbancey /Ministère des Armées

Dans le futur, comment les armées se serviront-elles de l’intelligence artificielle pour perfectionner leurs stratégies militaires ? Quels bénéfices les forces françaises peuvent-elles en tirer concrètement sur le terrain des opérations ? Par quels moyens se préparer d’ores et déjà à l’omniprésence de ces technologies, sans nous laisser happer par elles ? Ces questions essentielles autour de l’IA militaire ont fait l’objet de conférences organisées par le ministère des Armées dans le cadre du Sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle. 

Trois éminents experts dans le domaine ont apporté leur pierre à l’édifice, lors d’un échange stimulant : l'amiral Pierre Vandier, commandant suprême allié transformation de l’Otan, Bertrand Rondepierre, directeur de l'Agence ministérielle pour l'intelligence artificielle de défense (Amiad) et Jeroen Van Der Glut, directeur de l'information du ministère néerlandais de la Défense.

Comme l’a affirmé le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, en discours préliminaire, « la France prend le leadership en matière d’IA militaire ». Ses écoles, ses formations, ses scientifiques, ses entreprises en constituent les principaux moteurs. Néanmoins, l’IA ne s’analyse pas qu’en termes de politique intérieure mais bien aussi au niveau mondial. « Nous sommes déjà dans une course », estime l’amiral Pierre Vandier. Au sein du commandement allié transformation qu’il dirige, 1 000 personnes travaillent quotidiennement sur les questions doctrinales et de transformation au sein de l’Otan, dont l’IA. Cette dernière constitue un outil immense d’accélération dans le recueil de données et de prise de décisions militaires. « Nous allons vers un changement exponentiel, confirme Jeroen Van Der Glut. L’IA, c’est surtout trois choses : la vitesse – grâce à la puissance de calcul en quelques secondes –, la précision – grâce à la profondeur d’analyse – et l’évolutivité. » 

L’IA, contrôler ou être dépassé ? 

L’application et l’utilisation que les États font de l’IA déterminent sans nul doute leur capacité d’adaptation à un monde bouleversé par la révolution numérique. En effet, « 100 fois plus de données ont été produites depuis 2012 », rappelle l’amiral Vandier. Et « cette révolution est un jeu d’adaptation. Il faut changer ensemble nos comportements », insiste-t-il. Les États et les armées doivent trouver un point d’équilibre, maîtriser à leur avantage ces nouvelles technologies, ne pas se laisser dépasser par des adversaires divers, le tout en évitant l’écueil de « la fuite en avant où plus rien ne serait contrôlé », précise l’amiral. Celui-ci rappelle d’ailleurs que « l’IA fait encore 20 % d’erreur », ce qui doit être pris en compte dans le logiciel de pensée des armées. Ni diabolisation ni mythification, donc. Mais, à l’heure des sociétés hyper-connectées, c’est bien « la question de la souverainetéqui est en jeu, note Jeroen Van Der Glut. Il faut avoir la maîtrise des données ». Même son de cloche du côté de l’amiral Vandier, pour qui « l’enjeu est de parvenir à harmoniser l’ensemble des politiques de traitement des données des 32 pays » de l’Otan. 

Bâtir des ponts entre les acteurs 

Il est certain que l’union peut faire la force en matière d’IA. « L’idée de l’Amiad est d’arriver à rapprocher des acteurs sans notions de l’IA avec ceux qui l’utilisent ou l’utiliseront demain », explique Bertrand Rondepierre. Et d’ajouter : « Les spécialistes de l’IA ne sont pas forcément les mêmes que les spécialistes de défense ». C’est pourquoi il est important de construire des ponts entre tous les protagonistes susceptibles d’avoir affaire à l’IA, y compris, pour les armées françaises, avec les acteurs internationaux, de bâtir « un éco-système de partenaires », plaide le directeur de l’Amiad.

L’éducation à l’IA, enjeu majeur

Toutefois, ces échanges et innovations sont impossibles à mettre en œuvre sans une éducation poussée sur ce sujet technique et spécifique qu’est l’IA. « Comment voulez-vous que les officiers prennent les bonnes décisions s’ils ne connaissent pas ces technologies elles-mêmes ? », s’interroge l’amiral Vandier. Face au manque de connaissances de ces derniers, il a mis en place un programme de formation au sein du Commandant suprême allié pour la transformation de l’Otan. Chaque mois, des vidéos, des livres et des podcasts sont ainsi envoyés aux officiers aux militaires. Car, comme le soutenait Kofi Annan, ancien secrétaire général des Nations-Unies, « la connaissance est le pouvoir. L'information est libératrice. L'éducation est la prémisse du progrès, dans chaque société, dans chaque famille ».

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