[Pensez stratégique] 1944 : comment la France a basculé dans le camp des vainqueurs ?
Dans ce 11e numéro de Pensez stratégique, le podcast de l'Académie de défense de l'École militaire (ACADEM), le général (2S) Benoit Durieux, l’historien Olivier Wieviorka ainsi que le diplomate et président de la Mission Libération, Philippe Etienne, croisent leur regard sur un épisode décisif de l’histoire de France.
Au micro de Daniel Desesquelle :
- Général (2S) Benoît Durieux
- Olivier Wieviorka - professeur des Universités à l’ENS (École normale supérieure de Paris-Saclay), spécialiste de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale
- Philippe Étienne – diplomate et président de la Mission Libération
A écouter sur Podcastics.
Ecoutez le podcastL’année 1944 marque une rupture décisive dans la conduite des opérations militaires. Avec l’avènement du combat aéroterrestre, les Alliés innovent tactiquement et posent les bases d’une guerre moderne. Le général Benoît Durieux analyse cette évolution majeure : « À partir de la fin juillet 1944, un mode de combat avec des divisions blindées interarmes et un mode de combat aéroterrestre se mettent en place. À ce moment, une sorte de culture militaire tactique va se répandre dans le monde entier et continue d’exister. » Au-delà de l’aspect technique, cette année met également en lumière la force de l’unité des Alliés. Pour le général Benoît Durieux, il n’y a pas de doute : « Le modèle de cette grande offensive aéroterrestre des Alliés, c’est finalement la façon dont nous imaginons et avons toujours imaginé une guerre en Europe sous le commandement de l’Otan. Cette unité des Alliés fut peut-être le meilleur facteur de dissuasion. »
Si la libération de la France en 1944 est une source d’immense soulagement, elle est également marquée par l’ampleur des destructions subies par le pays. Olivier Wieviorka revient sur cette période complexe : « Avec le départ des Allemands, beaucoup espéraient un retour rapide à la normalité. Mais les pénuries persistaient, le rationnement dura jusqu’en 1949 et le pays était en grande partie détruit. Sur 40 000 kilomètres de voies ferrées, seuls 18 000 étaient opérationnels, et un million de Français étaient sans abri. La France est alors un pays martyr. » Mais malgré ce contexte de souffrances et de destructions, la France va réussir à amorcer son retour sur la scène internationale.
En 1944, alors qu’elle est absente des grandes conférences internationales telles que celles de Téhéran1 ou Dumbarton Oaks2, son retour sur le devant de la scène diplomatique mondiale se met en place progressivement, porté par l’action de ses diplomates.
Selon Philippe Étienne, si la France n’était pas présente à la conférence de Dumbarton Oaks, sa place dans le monde de l’après-guerre ne pouvait plus être contestée par les Alliés après les succès du débarquement de Provence et de la libération de Paris : « De même qu'il y a eu les administrateurs, les préfets, les commissaires de la République, il y a des diplomates qui vont se mobiliser. Un groupe de travail est constitué fin 44 sous la présidence du ministre Bidault et va préparer la conférence de San Francisco sur la base des résultats de Dumbarton Oaks. À Dumbarton Oaks, par exemple, le droit de véto, et certains sujets très complexes des futures Nations unies ne sont pas encore réglés. Et donc, la France va se retrouver au départ des Nations unies comme un membre permanent, ce qui n'était pas du tout acquis au début. »
1 La conférence de Téhéran est la première, du 28 novembre au 1er décembre 1943, à réunir les puissances alliées. Rappelant les principes de la Charte de l'Atlantique, elle a surtout pour objet de coordonner les opérations militaires entre les trois puissances
2 La conférence de Dumbarton Oaks, près de Washington, est présidée par le secrétaire d'État des États-Unis, Edward R. Stettinius et se tint du 21 août au 7 octobre 1944 avec la participation de délégués britanniques, américains, chinois et russes. Elle a pour mission d’établir la paix et la sécurité internationales et d’élaborer le plan de l’Organisation des Nations unies (ONU) et sert de base à la Charte des Nations unies.
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