[SPDMM 2023] Travailler ensemble contre les menaces hybrides dans le Pacifique Sud
La réunion des ministres de la Défense du Pacifique Sud (SPDMM*) s’est terminée mercredi 6 décembre à Nouméa. Quels étaient les enjeux des débats ? Trois tables rondes – « analyser », « anticiper » et « opérer » - ont été organisées sur deux jours pour discuter des sujets communs. Décryptage.
Analyser ensemble, c’est le nom de la première table ronde qui s’est tenue lors de la réunion des ministres de la Défense du Pacifique Sud. En quoi cela consiste-t-il ? Mettre en commun les visions de chaque État membre sur les enjeux sécuritaires qui menacent le Pacifique Sud, mais aussi les outils et les cadres juridiques étatiques. Une préoccupation commune anime les débats : la multiplicité des crises. Le changement climatique est le défi principal à relever et les catastrophes naturelles fragilisent les États, parfois touchés par d’autres crises.
Dernier exemple en date, en mars dernier, l’archipel du Vanuatu est frappé par un séisme de magnitude 6,5, suivi par le passage de deux cyclones coup sur coup. Le pays de 320 000 habitants est placé en état d’urgence. Il faut déployer de l’aide humanitaire mais le Vanuatu est un archipel de 83 îles. Il faut donc disséminer les livraisons depuis la capitale jusqu’aux population les plus isolées. Les Forces armées en Nouvelle-Calédonie sont mobilisées. Moins de deux jours après la catastrophe, un bâtiment de Marine nationale est déployé depuis la Nouvelle-Calédonie avec 10 tonnes d’aide humanitaire. Deux vols militaires permettent également d’acheminer 10 tonnes de fret.
Cette opération a confirmé l’importance des forces armées dans la gestion de crise après des phénomènes climatiques violents. Elle a également souligné l’importance de la coordination régionale. L’activation du dispositif diplomatique FRANZ, le partenariat trilatéral entre la France, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, relatif à la coopération en matière d’aide d’urgence en cas de catastrophe naturelle dans le Pacifique Sud, a permis de coordonner au mieux l’acheminement de l’aide de ces trois pays. Le Vanuatu fait partie de la « ceinture de feu » du Pacifique où entrent en collision les plaques tectoniques. L’île est classée parmi les pays les plus exposés aux catastrophes naturelles. Au-delà des dommages qu’ils engendrent, ces phénomènes climatiques extrêmes, lorsqu’ils s’abattent sur un État, le rendent plus vulnérable aux tentatives de déstabilisation. Les enjeux deviennent, de fait, hybrides et multiples.
Capacité de projection
Face à l’impact du changement climatique, les forces armées ont une capacité inestimable : celle de se projeter. Leurs capacités logistiques, de commandement et d’accès à des zones sinistrées est un levier d’action pour secourir la population lors des catastrophes naturelles. Pour le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, cela passe notamment par une modernisation des moyens.
Les menaces sur les ressources halieutiques étaient également au menu des discussions. « La pêche illégale a été un sujet discuté dès la première table ronde et évoqué à plusieurs reprises », confirme le contre-amiral Geoffroy d’Andigné, commandant de la zone Asie-pacifique et les forces armées en Polynésie françaises. La France souhaite renforcer les dispositifs d’embarquements croisés entre les États du Pacifique Sud afin de créer une intimité stratégique entre les marins. Selon le contre-amiral d’Andigné : « La proposition de la France est très intéressante et les rebonds des participants sur le sujet montrent qu’elle est la bienvenue ».
Anticipation et coordination
Après l’analyse, l’anticipation commune fut le sujet de la seconde table ronde. Anticiper est primordial pour réagir rapidement et efficacement en cas de crise. À ce titre, la France propose d’approfondir le partage d’information entre les États membres. Pour le général Éric Peltier, officier général des relations internationales militaires : « Ce n’est pas un sujet nouveau car cela fait déjà 10 ans que nous échangeons de l’information, mais il faut le faire plus et de manière plus structurée. » Les bénéfices sont multiples : multiplication des sources, connaissance plus précise et plus fiable de l’environnement. « Partager les données, c'est aussi avoir une analyse et compréhension commune de la situation. Celles-ci permettent à leur tour d’opérer ensemble afin de dédier les bons moyens au bon endroit en fonction de la menace », ajoute le général.
Opérer ensemble fut le thème de la troisième table ronde. « C’est une nécessité face à la multiplicité des crises. Pour cela, il faut renforcer notre coordination, voire notre intégration avec les moyens dédiés », explique le général Peltier. Les exercices régionaux comme Povai Endeavour, mis en œuvre par le SPDMM de 2015, sont un levier pour renforcer l'interopérabilité entre les pays membres. L'exercice Croix du Sud, organisé par les FANC, en est une illustration. Dans cette logique, les débats ont validé le projet français d'un cadre de formation pour les États du SPDMM. Le ministre des Armées en a profité pour présenter l'Académie du Pacifique, dont le volet militaire proposera des formations pratiques et techniques aux militaires des pays de la région.
Par Laura Garrigou, à Nouméa
*SPDMM : South Pacific Defence Ministers’ Meeting
[SPDMM 2023] Réunion des ministres de la Défense du Pacifique Sud
Pays représentés, enjeux sécuritaires et forces en présence : découvrez notre dossier de l’édition 2023 marquant les 10 ans de ce sommet.
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