IA de défense : 6 cas d’usage concrets dans les armées
A l’occasion du salon Eurosatory, six cas d’usage de l’intelligence artificielle dans les armées ont été présentés lors d’une conférence animée par Bertrand Rondepierre, directeur de l’Agence ministérielle pour l’IA de défense (Amiad). L’occasion de découvrir l’étendu des possibilités offertes par cette technologie et les perspectives pour les futurs systèmes d’armement.
Formation des pilotes, lutte contre la désinformation, assistance aux « oreilles d’or » dans les sous-marins… le virage de l’intelligence artificielle est en cours dans les armées. Au salon Eurosatory, lors d’une conférence dédiée aux applications concrètes de l’IA de défense, Sébastien Lecornu a rappelé les enjeux de cette technologie. « L’IA est une révolution au même titre que l’atome. Elle va créer inévitablement une rupture entre ceux qui seront largués et ceux qui auront su s’accrocher. Le but est que la France fasse partie de ceux qui se distinguent en la matière. »
De son côté, Bertrand Rondepierre est revenu sur le rôle premier de l’Amiad : professionnaliser l’usage de l’intelligence artificielle dans les armées en transformant des idées en application opérationnelle. Il a ensuite invité « celles et ceux qui font vivre l’IA de défense » à venir présenter six cas d’usage concrets au sein des armées.
1 - Oreille d’or – traiter massivement des données acoustiques en appui des oreilles d’or
L’augmentation du trafic maritime et la multiplication du volume de données à traiter complexifie le travail des analystes en guerre acoustique, aussi appelés les « oreilles d’or ». Le recours à l’IA permet ainsi de traiter un grand nombre de données et d’y faire le tri afin d’orienter l’attention des opérateurs sur les seuls signaux à valeur ajoutée, sur lesquels ils pourront apporter leur compétence métier. Les premiers retours d’expérience montrent un gain de temps de près de 98 %.
2 - DeMAIA – appuyer les équipages dans la veille optique des véhicules Griffon
Le Griffon, véhicule blindé de l’armée de Terre et symbole du programme Scorpion, dispose de six caméras intégrées dont les images sont retransmises en direct dans l’habitacle. Pour l’équipage, ce flux vidéo permanent est difficile à exploiter, analyser et surveiller. Or, la capacité à détecter l’ennemi le plus rapidement possible est déterminante dans l’issue du combat. A partir de ce constat, des ingénieurs ont équipé des Griffon d’un outil basé sur l’IA, capable de repérer des cibles cachées jusqu’à trois kilomètres des capteurs et ce même en lisière de forêt. Pour les opérateurs, cela se matérialise par un rectangle rouge autour de l’ennemi qu’ils peuvent suivre en temps réel.
3 - Rora – Identifier rapidement des pièces détachées
La SIMMT (Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres) a la charge du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres des armées, directions et services du ministère. Les opérateurs qui la composent (maintenanciers, logisticiens, etc.) manipulent durant leurs missions plusieurs dizaines de milliers de pièces dont certaines sont complexes à identifier. Les conséquences sont diverses : erreurs de logistique, retards de maintenance et d’approvisionnement. Pour parer à ces difficultés, l’application Rora permet d’identifier une pièce avec exactitude grâce à une simple photo prise avec une tablette ou un téléphone. Cette solution basée sur l’intelligence artificielle offre du temps aux opérateurs et peut également fonctionner hors ligne, une caractéristique très utile pour les réparations en milieu hostile.
4 - IA versus deepfake - Détecter les informations mensongères contre les forces armées
L’IA permet aujourd’hui de falsifier et de manipuler facilement des vidéos, des images ou des audio. Ces contenus, diffusés sur les réseaux sociaux ou internet, peuvent avoir de graves répercussions pour les unités déployées en opération. Pour certains d’entre eux, en particulier les deepfakes, déceler le vrai du faux constitue un véritable défi que seul un algorithme peut aujourd’hui relever avec fiabilité. Pour les opérateurs, l’IA permet ainsi de consolider rapidement une intuition et de pointer les passages manipulés pour faciliter une exploitation opérationnelle (dénonciation par exemple).
5 - IA FPN – Maximiser les chances de succès de la formation des pilotes
La formation des personnels navigants (FPN) est un parcours long et exigeant. En moyenne, 10 % des élèves échouent durant leur cursus malgré une sélection particulièrement outillée (tests psychotechniques, aptitude médicale, entretiens psychologiques et de motivation). Un échec est à la fois une épreuve difficile à surmonter pour l’élève et très couteux pour l’institution, surtout s’il arrive tardivement. L’enjeu est donc d’alerter les instructeurs suffisamment tôt mais aussi et surtout de cibler scientifiquement les efforts pour surmonter les difficultés que l’élève pilote rencontre et ainsi maximiser ses chances de succès. L’IA en est aujourd’hui capable de par sa capacité à analyser les nombreuses données recueillies lors de la formation (vol ou simulation). Le but : apporter aux formateurs des éclairages pertinents pour orienter au mieux leur apprentissage.
6 - Resistance : traduire instantanément des langues étrangères sur son smartphone en opération
En opération, communiquer avec les populations civiles et les autorités locales est une nécessité quotidienne. Toutefois, la présence d’un traducteur humain n’est pas toujours assurée. Pour maintenir l’autonomie des forces, l’application Resistance est capable de traduire instantanément 19 langues, dont le russe, l’arabe et le mandarin, aussi bien à l’écrit, à l’oral ou à partir d’une photo. Son autre bénéfice : la possibilité de l’employer hors-connexion et sans réseau.
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