Un ministère qui s’engage concrètement contre les violences sexuelles et sexistes
Depuis 1999, le 25 novembre est la journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes. À cette occasion, entretien avec Bernard Pêcheur, président du comité de suivi du programme contre les violences sexuelles et sexistes au sein du ministère des Armées et des Anciens combattants.
Depuis le mois de juin dernier et la remise du rapport d’enquête sur les violences sexuelles et sexistes (VSS) au sein du ministère demandé par Sébastien Lecornu, ministre des Armées et des Anciens combattants, c’est un véritable changement de perspective en la matière qui est en cours au sein des armées. La mise en place, le 11 octobre, d’un comité de suivi sur ces questions en est la preuve. Bernard Pêcheur, président de section (h) au Conseil d’État, a été nommé à sa tête par le ministre en tant que personnalité qualifiée chargée de l’appuyer dans cette démarche qui lui tient particulièrement à cœur. Il revient sur son rôle et les évolutions qui voient le jour et celles à venir. Avec une priorité absolue : la victime est au centre de tout.
Pourquoi avoir accepté cette mission particulière que vous a confiée Sébastien Lecornu ?
Après 50 ans d’expérience au service de l’État, j’ai immédiatement senti que cette démarche (définie par les instructions des 26 mars et 28 juin 2024) correspondait à une conviction personnelle et sincère du ministre, ainsi qu’à une volonté partagée par les grands subordonnés, de mener dans la durée un programme d’actions qui n’a guère d’équivalent et qui est, à mes yeux, exemplaire et nécessaire. Je ne saurai être, et d’ailleurs le ministre ne m’a pas nommé pour cela, un simple témoin ou une simple caution, mais j’entends participer activement au suivi et au pilotage du programme ministériel.
En quoi ce nouveau programme est-il exemplaire ?
Principalement en raison de son ampleur et de son caractère systémique. Je connais peu d’ensembles humains — institutions publiques, administrations, entreprises, milieux confessionnels — capables comme les armées et le ministère des Armées et des Anciens combattants d’engager, de conduire et de mener à bien un programme ayant cette importance et cette ambition.
Ce dernier est nécessaire, voire indispensable. En ma qualité de président de section (h) au Conseil d’État, d’ancien président du Haut comité d’évaluation de la condition militaire et actuellement de président du Comité d’éthique de la défense, j’ai la conviction que, loin de stigmatiser la fonction militaire et d’accabler ceux (officiers, sous-officiers, militaires du rang) qui servent dans les armées, le programme d’action contre les VSS a pour objet et aura pour effet de valoriser pleinement leur engagement au service de la Patrie. Comment ? En prévenant ou en sanctionnant des fautes ou des crimes et délits absolument incompatibles avec l’éthique militaire, les valeurs d’honneur et de dignité, la fraternité d’armes et le sens profond de l’engagement au service de la France. Nos compatriotes, qui ont une grande considération pour les armées de la République, ne comprendraient pas qu’il puisse y exister une absence de vigilance, une tolérance, a fortiori une impunité à l’égard des violences sexuelles et sexistes.
L’un des premiers changements concrets de ce nouveau programme concerne la cellule Thémis (cf. encadré). Pouvez-vous nous expliquer son nouveau rôle ?
Créée en 2014, elle a joué un rôle de pionnier pour recueillir les témoignages des victimes et lancer les enquêtes. Mais l’instruction ministérielle du 28 juin 2024 en change les missions, conformément aux préconisations des inspecteurs généraux des armées dans leur rapport du 10 juin 2024. À partir d’aujourd’hui, il faut parler de Thémis NG, pour Thémis nouvelle génération. Placée sous l’autorité du contrôleur général des armées Thibault de Laforcade, elle a désormais en charge le secrétariat général du comité de suivi du programme. Elle devient en quelque sorte la « tour de contrôle » du programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Sa mission initiale de prévention, protection des victimes et sanction des auteurs est désormais à la charge du commandement et de l’encadrement.
Thémis NG veille à la protection des victimes qui la saisissent directement, elle conseille les auteurs de signalement (ADS) et contrôle la qualité du suivi des victimes ainsi que la cohérence des sanctions des auteurs. Elle dispose désormais en son sein d’un observatoire dont la mission va être de recueillir les données, de les analyser, de les comparer en interministériel et à l’international (avec les autres armées). Des études qualitatives, des sondages devraient pouvoir être menés pour orienter la prévention, identifier les bonnes pratiques et nouer de nouveaux partenariats, comme ceux excellents déjà noués avec la Maison des femmes de Saint-Denis.
Thémis NG est, vous l’avez compris, un élément clef du dispositif. C’est la raison pour laquelle ses effectifs ont été doublés et ses compétences renforcées (par un magistrat, un communicant, un greffier…). Elle doit d’abord accompagner ceux qui sont en première ligne, les conseiller en second lieu, mais aussi alerter le ministre en cas de manquement.
Thémis nouvelle génération
Après dix ans d’existence, la cellule Thémis évolue : doublement des effectifs, élargissement de ses missions, partenariat avec des associations d’aide aux victimes, formations et sensibilisation.
Le contrôleur général des armées, Thibault de Laforcade, son directeur, explique son rôle et ses évolutions : « La cellule Thémis a été créée à l’époque pour accueillir les signalements de faits de violences sexuelles et sexistes de toutes les victimes qui ne souhaitaient pas s’adresser directement à la chaîne hiérarchique, leur donner tous les conseils nécessaires et les accompagner dans leurs démarches. Elle se voit désormais confier un rôle accru de formation et de sensibilisation, mais surtout un rôle de supervision du bon traitement de l’ensemble des faits de violences sexuelles et sexistes survenus au ministère. »
Pour contacter la cellule Thémis par téléphone : 09 88 68 55 55
Ou par courriel : themis@intradef.gouv.fr
Pour celles ou ceux qui souhaiteraient avoir un accompagnement psychologique il est aussi possible de contacter la cellule « Ecoute défense » N° Vert : 08 08 800 321
Contenus associés
Lutte contre les violences sexuelles et sexistes : des avancées significatives
Présidé par le ministre des Armées et des Anciens combattants, Sébastien Lecornu, le comité de suivi du programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes s’est réuni pour la première fois vendredi 11 octobre. A l’ordre du jour : les premiers résultats encourageants après l’application des mesures demandées dès le mois de mars dernier.
14 octobre 2024

« Il y a une réelle volonté de lutter contre les VSS au sein du ministère »
Entretien avec la docteur Ghada Hatem, fondatrice du collectif maison des Femmes-Restart et membre du comité de suivi du programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS) au sein des armées, qui s’est réuni pour la première fois ce vendredi 11 octobre.
11 octobre 2024

Installation du comité de suivi du programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes
Sébastien Lecornu, ministre des Armées et des Anciens combattants, a désigné, le 30 septembre dernier, les membres du comité de suivi du programme de lutte contre les violences sexuelles et sexistes (VSS) au sein des armées. La première réunion du comité se tiendra le 11 octobre 2024.
04 octobre 2024
