Libération de la Corse : comment résistants et soldats italiens ont affronté le Reich (2/3)

Direction : Ministère des Armées / Publié le : 26 septembre 2023

Emmanuel Macron se rend en Corse, jeudi 28 septembre, pour commémorer les 80 ans de la libération de l'île. Le 4 octobre 1943, après un mois de combats, la Corse devenait en effet le premier territoire français libéré. Récit de ces semaines marquées par un retournement d’alliance salutaire.

Des résistants corses traversent le maquis. © © Service historique de la Défense, Vincennes.

Dans la nuit du 8 au 9 septembre 1943, dans le port de Bastia, la défense anti-aérienne italienne tire sur des avions allemands. En réponse, ces derniers attaquent un navire italien en train d’appareiller. Le bateau prend feu. Plus tard dans la journée, résistants corses du Front national et soldats transalpins s’emparent de la citadelle, de la gare et des principales voies de communication, faisant au passage de nombreux prisonniers. La libération de l’île a commencé, même si la ville sera reprise par les Allemands dès le 13 septembre. Quelques jours plus tôt, Rome et Berlin étaient pourtant alliés.

Capitulation italienne

A la chute de Mussolini, fin juillet 1943, l’Italie se trouve dans une position délicate. Partagé entre ses obligations envers le Reich et son souhait de mettre un terme à la guerre, le nouveau gouvernement du maréchal Pietro Badoglio signe un armistice secret avec les Alliés, le 3 septembre. Mais les Allemands ne sont pas dupes. Ils se préparent en effet à cette éventualité depuis plusieurs semaines déjà. Quand l’Italie officialise l’accord, le 8 septembre, Hitler déclenche l’opération Asche. Conséquence : les forces transalpines sont désarmées ou neutralisées. Surtout, les positions stratégiques qu’elles occupaient sont reprises, à commencer par la Corse.

« Attaquée par les Allemands, une grande partie des troupes italiennes réplique et rejoint de fait le camp de la Résistance. Une fraction refuse cependant l’armistice et continue sa lutte avec l’Allemagne, contre leurs frères d’armes », rappelle Sylvain Gregori, conservateur du musée de Bastia. « Le général Magli, commandant des troupes italiennes en Corse, est le principal responsable de cette situation un peu confuse sur le terrain. Il n’a pas voulu, par germanophilie, engager de suite ses forces contre les Allemands. Face aux demandes répétées du général Giraud, il finit par donner des consignes en ce sens à partir du 20 septembre. »

L’insurrection

Le 9 septembre, au 1er jour de l’insurrection lancée par le Front national, Ajaccio est définitivement libérée. Grâce à son port, les renforts pourront arriver facilement. De son côté, Bastia, qui était retombée dans le camp ennemi après quelques jours de délivrance, devient un objectif prioritaire. Depuis Alger, le Comité français de libération nationale1 (CFLN) est pris de court. Il doit s’adapter rapidement à la situation. « C’est une période charnière pour Giraud, peu à peu évincé par de Gaulle, son grand rival du CFLN. Il voit alors la campagne de Corse comme une opportunité pour se remettre en scène politiquement », explique Sylvain Gregori. Sa réponse ne tarde pas. Le 13 septembre, le 1er bataillon de choc débarque à Ajaccio. Il est vite rejoint par des tirailleurs marocains, des spahis, des goumiers et des éléments de l'artillerie et du génie. Au total, près de 6 000 hommes et 400 tonnes d'armes atteignent la côte ouest de l’île de beauté. Nom de code : opération Vésuve.

Direction Bastia

Si elles sont sur la défensive, la brigade d’assaut SS Reichsführer et la 90e Panzer division ne comptent pas se laisser faire. Mais très vite, le général allemand Fridolin von Senger doit se rendre à l’évidence. A partir du 11 septembre, il ne songe plus qu’à évacuer ses hommes depuis le port de Bastia tout en protégeant sa retraite. La ville du nord de la Corse concentre alors toute l’attention. Pour l’atteindre, les Français doivent enlever les massifs qui l’entourent. Une tâche dans laquelle les goumiers marocains excellent. Après le col de San Stefano le 30 septembre, ils prennent celui de Teghime, trois jours plus tard, sous de fortes pluies et un brouillard omniprésent. « Ce sont des soldats habitués à combattre en zone montagneuse. Justement, les derniers jours de la campagne de Corse se déroulent dans un environnement pour lequel ils sont parfaitement adaptés », souligne Sylvain Gregori. Ravagée par les combats et les bombardements américains, Bastia est finalement libérée le 4 octobre 1943.

1 Le Comité français de libération nationale est la fusion, à partir de juin 1943, du Comité national français du général de Gaulle et du Commandement en chef français civil et militaire du général Giraud.

80 ans de la libération de la Corse : un récit en trois actes.

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